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Chapitre IV

SAMUEL BUTLER ET SON INFLUENCE


Quand Samuel Butler mourut, en 1902, à 67 ans, il n’avait jamais connu la grande célébrité. Hors un petit nombre de savants, émus par sa querelle avec Darwin et ses idées sur l’évolution, peu de gens cultivés connaissaient son nom, moins encore ses œuvres. Elles sont étudiées maintenant presque comme des classiques. Une catastrophe sans pareille a sévi pendant six années, durant lesquelles les ouvrages de cet inconnu, de ce méconnu, ne cessaient de s’imprimer, de se réimprimer. Je compte quatre éditions populaires entre octobre 1915 et août 1918 de son vieil Erewhon, une Utopie publiée pour la première fois en 1872. Son roman, son unique roman : The Way of All Flesh, commencé depuis trente ans, retouché pendant douze années, n’était nî fini, ni publié, quand il mourut. Il a fallu en reconstituer deux ou trois chapitres, dont le manuscrit était perdu. Pourtant, il ne passe pas d’année depuis 1908 sans une nouvelle et copieuse édition de cet ouvrage, qui n’a cessé d’être réimprimé durant la guerre.

Notez que rien d’actuel, de sensationnel, de vulgaire, ne fait appel dans l’œuvre de Samuel Butler aux préférences du gros public. Elle ne s’adresse qu’aux gens très cultivés. Les autres sont incapables de l’apprécier. C’est même une de ses faiblesses. La force de Butler est dans la qualité de l’ironie, la saveur du style, la vigueur et