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Page:Chevalley - Le Roman anglais de notre temps.djvu/37

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cadre, été reproduite si minutieusement, si diversement, si vigoureusement, et n’a mieux, en somme, évoqué la vie de tous les temps et de tous les êtres, celle qui se déroule en nous, pas autour de nous, à l’intérieur, non à la surface.

C’est dans une direction toute contraire que Walter Scott, à la même époque, entraînait le roman anglais. « Cette touche exquise, » confessait-il, à propos de Jane Austen, « qui, par la vérité de la description, rend intéressants même les êtres et les choses les plus ordinaires, elle m’a été refusée. »


Qu’est-ce en effet que Walter Scott ? Un poète rentré, un grand poète épique, narratif, descriptif, évocateur, lequel, déçu et dépassé dans la poésie, prend sa revanche en prose. Il anoblit le roman en y portant l’éclat des genres jusqu’alors dits nobles.

Notre génération oublie Walter Scott. Son œuvre lui paraît un article de musée. Chez ce conservateur, il y avait un révolté, celui qui est au fond de tout romantique. Il avait été littéralement « séduit » dans sa jeunesse par les vieilles ballades écossaises. Elles offraient aux imaginations tourmentées, dans leur cadre archaïque mais réel, une matière aussi riche et plus solide que les romans- cauchemars alors en vogue. Ses premières œuvres sont aussi des romans, mais en vers : The Lay of the Last Minstrel, Marmion, The Lady of the Lake. Soudain, Byron lui ravit la palme et le succès poétiques, parce qu’il exprime mieux, dans des ouvrages du même genre, la révolte du sentiment et de l’imagination. Walter Scott se retire d’abord. Puis, neuf ans après avoir commencé Waverley, il reprend et complète en quelques semaines cette esquisse en prose (1814). Mais il y reste poète, homme d’imagination. Le succès est immense, foudroyant. Scott avait