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Page:Chiarini - Le Talmud de Babylone, vol. 1, 1831.djvu/32

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Il est donc évident qu’aussitôt que la réputation de son auteur eut élevé ce recueil à la même dignité que la Mischna, et eut permis que le commentaire fût écrit dans la même colonne que son texte, le premier a dû acquérir le titre de Ghemara parce qu’il n’était que le complément du recueil de Juda le Saint. Si R. Johanan a laissé plusieurs traités de la Michna sans commentaire il est à savoir que les docteurs de ce temps avaient le même usage que les Rabbins de nos jours ; c’est-à-dire, ils ne fesaient point de tout le corps de la tradition l’objet de leurs cours académiques ; ils ne suivaient pas non plus l’ordre d’après lequel Juda le Saint avait arrangé son livre ; mais ils commençaient par interpréter les traités mischniques les plus indispensables en réservant les moins importans pour les derniers. Or, comme nous venons d’observer que les traités où l’on parle de l’agriculture, des sacrifices et des purifications intéressaient fort peu les Juifs de la dispersion, on peut conjecturer que R. Johanan entreprit bien tard [1]

  1. tes ces paroles, c’est-à-dire il prononça jusqu’aux réponses que les disciples demanderont en tous temps à leurs précepteurs (voy. le Midrasch Vaykra Rabba Sect. 22.). Dieu dit à Moïse, après que celui-ci eut tout appris de sa bouche : Enseigne Israël. Il répondit : Maître de l’univers, je leur écrirai tout cela. Il reprit : Je ne veux pas que tu écrives la loi orale, car je prévois que les nations de la terre domineront un jour sur mon peuple, et qu’elles peuvent la lui ravir. Je lui donnerai par écrit le seul volume de la Bible et de vive voix la Mischna, la Ghemara et l’Agada, je les leur donnerai de vive voix afin que si les nations du monde viennent à augmenter et rendent les Israélites esclaves ; ceux-ci soient séparés d’elles. C’est pourquoi le Prophète a dit (selon l’auteur de ce Midrasch) : Si j’écrivais les choses principales de la loi elles pourraient passer entre les mains des étrangers. Que ferai-je donc ? Je lui donnerai la Mikra (ou la Bible) couchée par écrit. Quant à la Mischna, à la Ghemara et à l’Agada c’est de vive voix que je les lui communiquerai. Ainsi lorsque l’on dit (dans l’Exode) : כתב לך écrit, on fait allusion à la Mikra (ou à la loi écrite) et lorsqu’on ajoute (ib.) כי על פי הרברים האלה car sur la bouche de ces paroles on fait allusion à la Mischna et à la Ghemara (ou à la loi orale) moyennant lesquelles les Israélites sont séparés des autres peuples שהם מברילים בין ישראל לבין האומות. C’est donc avec raison que nous définissons le Talmud une muraille de séparation élevée entre les Juifs et les non-Juifs de tous les temps et de tous les lieux.