la lui donner à lui-même ; elle la tenait à la main, elle la poussait de son côté, espérant toujours qu’il la verrait du coin de l’œil et la prendrait du bout des doigts.
Daniel siffla. La foule s’écarta ; il disparut.
Et Mabel rentra chez elle, presque folle, poursuivie par les cris de : « Vive Daniel Lambert ! » auxquels l’écho de son cœur répondait :
— Il m’aime plus ! il ne m’aime ne plus !
Elle n’alla plus à la poste. Mais, pendant toute la semaine suivante, chaque jour, à la même heure, elle attendit sur la route le géant à l’endroit où elle l’avait vu pour la première fois.
Il approchait, il passait, tantôt vite, tantôt lentement, poussant de gros soupirs, regardant à droite et à gauche, fumant toujours, souriant toujours, mais ne s’occupant pas plus de Mabel, qui gardait sa petite lettre à la main et son gros amour dans le cœur, que s’il n’avait jamais daigné penser à elle.
Cette : indifférence, qui était devenue de l’ingratitude, bouleversa la tête de la jeune fille. Mabel se jura à elle-même, si jeune, si chétive, si mignonne qu’elle fût, de