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Page:Chincholle - Dans l’Ombre, 1871.pdf/70

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un cafetier en faillite. En hiver, le tuyau d’un poêle est censé échauffer, en la traversant, toute cette pièce. L’été, un carton enseignant les règles du jeu de billard bouche l’un des trous par lesquels passa ce tuyau ; l’autre trou est caché par un tableau représentant quelque bienfaiteur de l’endroit, qui se rend populaire en prodiguant son image. Le Corps législatif lui soit propice ! La partie coûte deux sous. Au village, on dira « centimes » dans un siècle. C’est pour ne pas perdre ces deux sous qu’on se querelle, qu’on jure, qu’on triche, qu’on s’appelle voleur et qu’on laisse au coin du feu sa femme, qu’elle soit jeune ou vieille. Presque autant de maris qu’il y a de paysans sur terre croient que la femme n’est au monde que pour faire le ménage et pour procréer. Les enfants, dès qu’ils ont quinze ans, tiennent lieu de domestiques.

L’argent, qu’on liarde à la maison, au cabaret on le boit sous forme de piquette ou d’eau-de-vie empoisonnée. Les cartes ou le billard nomment le payant.

La partie terminée, ces gens que douze heures de travail machinal et incessant ont complètement abrutis et qui viennent de s’embourber dans la « consommation »