Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 1.djvu/203

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la nécessité. C’est l’amour qui m’a conduit ; c’est lui qui réclame votre indulgence, qui vous demande de pardonner une confidence nécessaire & sans laquelle nous restions peut-être à jamais séparés[1]. Vous connaissez l’ami dont je vous parle ; il est celui de la femme que vous aimez le mieux. C’est le vicomte de Valmont.

Mon projet, en m’adressant à lui, était d’abord de le prier d’engager madame de Merteuil à se charger d’une lettre pour vous. Il n’a pas cru que ce moyen pût réussir ; mais au défaut de la maîtresse, il répond de la femme de chambre, qui lui a des obligations. Ce sera elle qui vous remettra cette lettre, & vous pourrez lui donner votre réponse.

Ce secours ne nous sera guère utile, si, comme le croit M. de Valmont, vous partez incessamment pour la campagne. Mais alors c’est lui-même qui veut nous servir. La femme chez qui vous allez est sa parente. Il profitera de ce prétexte pour s’y rendre dans le même temps que vous ; & ce sera par lui que passera notre correspondance mutuelle. Il assure même que, si vous voulez vous laisser conduire, il nous procurera les moyens de nous y voir, sans risquer de vous compromettre en rien.

À présent, ma Cécile, si vous m’aimez, si vous plaignez mon malheur, si, comme je l’espère, vous

  1. M. Danceny n’accuse pas vrai. Il avait déjà fait sa confidence à M. de Valmont avant cet événement. (Voyez lettre LVII.)