cœur m’en garderait le prix ? Quel est donc l’homme assez malheureux pour ne pas savoir jouir des privations qu’il s’impose ; pour ne pas préférer un mot, un regard accordés, à toutes les jouissances qu’il pourrait ravir ou surprendre ? & vous avez cru que j’étais cet homme-là ! & vous m’avez craint ! Ah ! pourquoi votre bonheur ne dépend-il pas de moi ? comme je me vengerais de vous, en vous rendant heureuse ! Mais ce doux empire, la stérile amitié ne le produit pas ; il n’est dû qu’à l’amour.
Ce mot vous intimide ! et pourquoi ? un attachement plus tendre, une union plus forte, une seule pensée, le même bonheur comme les mêmes peines, qu’y a-t-il donc là d’étranger à votre âme ? Tel est pourtant l’amour ! tel est au moins celui que vous inspirez & que je ressens ! C’est lui surtout, qui, calculant sans intérêt, sait apprécier les actions sur leur mérite, & non sur leur valeur ; trésor inépuisable des âmes sensibles, tout devient précieux, fait par lui ou pour lui.
Ces vérités si faciles à saisir, si douces à pratiquer, qu’ont-elles donc d’effrayant ? Quelles craintes peut aussi vous causer un homme sensible, à qui l’amour ne permet plus un autre bonheur que le vôtre ? C’est aujourd’hui l’unique vœu que je forme : je sacrifierai tout pour le remplir, excepté le sentiment qui l’inspire ; & ce sentiment lui-même, consentez à le partager, et vous le règlerez à votre choix. Mais ne souffrons plus qu’il nous divise, lorsqu’il devrait nous