Page:Choderlos de Laclos - Les Liaisons dangereuses, 1869, Tome 2.djvu/159

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sage d’éclairer un convalescent sur les dangers qu’il a courus, pour lui inspirer la prudence dont il a besoin, & la soumission aux conseils qui peuvent encore lui être nécessaires.

Puisque vous me choisissez pour votre médecin, c’est comme tel que je vous parle, & que je vous dis que les petites incommodités que vous ressentez à présent, & qui peut-être exigent quelques remèdes, ne sont pourtant rien en comparaison de la maladie effrayante dont voilà la guérison assurée. Ensuite comme votre amie, comme l’amie d’une femme raisonnable & vertueuse, je me permettrai d’ajouter que cette passion, qui vous avait subjuguée, déjà si malheureuse par elle-même, le devenait encore plus par son objet. Si j’en crois ce qu’on dit, mon neveu, que j’avoue aimer peut-être avec faiblesse, & qui réunit en effet beaucoup de qualités louables à beaucoup d’agréments, n’est ni sans danger pour les femmes, ni sans tort vis-à-vis d’elles, & met presque un prix égal à les séduire & à les perdre. Je crois bien que vous l’auriez converti. Jamais sans doute personne n’en fut plus digne : mais tant d’autres s’en sont flattées de même, dont l’espoir a été déçu, que j’aime bien mieux que vous n’en soyez pas réduite à cette ressource.

Considérez à présent, ma chère belle, qu’au lieu de tant de dangers que vous aviez à courir, vous aurez, outre le repos de votre conscience & votre propre tranquillité, la satisfaction d’avoir été la principale cause de l’heureux retour de Valmont. Pour moi, je ne doute pas que ce ne soit, en grande partie, l’ouvrage