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Page:Choisy - Journal du voyage de Siam, 1687.djvu/218

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Journal

ne me ſuis jamais trouvé à telle fête, & je croyois eſtre devenu Pape. Suivoient les gentilshommes à cheval ; les gens de la maiſon, trompettes & livrées à pié. Nous avons marché dans une ruë auſſi longue & plus étroite que la ruë Saint Honoré, entre deux doubles files de ſoldats, le pot en tête & le bouclier doré. Les uns ont des ſabres, & les autres des piques. Il y avoit ſur notre chemin de temps en temps des éléphans armez en guerre. Tout s’eſt arrêté à la premiere porte du palais. M. l’Ambaſſadeur eſt décendu de ſa chaiſe ; a pris la Lettre du Roi ſur le char de triomphe ; eſt entré dans le palais, en la portant ; & enſuite me l’a remiſe entre les mains. Nous avons marché gravement, les gentilshommes devant, & les Oyas à droite & à gauche. Nous avons paſſé trois ou quatre cours. Dans la premiere, il y avoit un régiment de mille hommes avec le pot en tête & le bouclier doré. Ils eſtoient aſſis ſur leurs talons, leurs mouſquets devant eux fichez en terre. Cela eſt aſſez beau à la veuë ; mais franchement je crois que cinquante mouſquetaires les battoient bien.

Dans la ſeconde cour il y avoit peut-eſtre trois cens chevaux en eſcadron. Les chevaux ſont aſſez beaux, & mal dreſſez. Mais, ce qu’on ne voit en nul lieu du monde, il y avoit des éléphans bien plus grands que ceux du dehors. Nous en avons bien veu quatre-vingts ; & entre autres le fameux éléphant blanc, qui dans les guerres de Pegou a