Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/139

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le même honneur à Racine ; mais qu’en cette occasion elle signale bien son aveuglement, et la différence qu’elle met entre ces deux illustres confrères !

Qu’il fut glorieux pour Corneille d’être loué par Racine ! Qu’il est malheureux pour Racine qu’entre tant de poètes et d’orateurs excellens, dont le nom eût fait honneur à sa mémoire, le sort ait choisi celui qui étoit le moins capable de célébrer tant de vertus.

Quelle grandeur ! quelle majesté ! quelle sublimité de pensées et de style éclatèrent dans cet éloge magnifique dont vous nous avez fait souvenir ! Il est tel que quand tous les ouvrages de ces deux auteurs incomparables seroient perdus, échappé de l’injure des temps, seul il pourroit rendre leurs deux noms immortels.

Si celui que je consacre aujourd’hui à la gloire d’un homme qui savoit si bien louer, et qui est si louable lui-même, n’est pas soutenu de toute cette pompe et de toute éloquence digne de la compagnie au nom de qui je parle, j’espère au moins qu’il se fera distinguer par un sujet de douleur, le plus juste et le plus grand qui puisse affliger les lettres.

Car à présent que ces deux poètes célèbres ne sont plus, la muse tragique, ne craignons point de le dire, la muse tragique est ensevelie elle-même sous la tombe qui les couvre.

Vous connoissez, Monsieur, toute la grandeur