Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/509

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célèbre à qui j’ai l’honneur de succéder.

M. de Mairan, né avec des goûts vifs, mais avec des passions douces, trouvoit dans son caractère, même au temps de sa jeunesse, une modération que le philosophe n’obtient pas toujours de l’expérience et de la réflexion. Il fut admis et chéri dans les meilleures sociétés ; ses connoissances, parées d’un tour d’esprit agréable et d’une politesse noble, facile, attentive, lui valurent une considération qui l’accompagna tout entier jusqu’à la fin de ses jours : son langage, son maintien, son air, respiroient une dignité simple, qui fit toujours respecter sa personne, et dans sa personne l’homme de lettres et les lettres elles-mêmes. Jamais il n’apporta dans le monde ce ton dogmatique et tranchant qui feroit haïr jusqu’à la raison et à la vérité. Si l’on avançoit une erreur, une absurdité, loin de montrer du mépris, de l’indignation, il n’avoit pas même l’air de la surprise ; il répondoit avec douceur, et toujours avec succès ; on sent plus utilement la vérité, en l’insinuant avec adresse, qu’en la faisant sentir avec force. M. de Mairan consoloit l’ignorance, lors même qu’il la combattoit. Jamais il n’affecta d’étaler les richesses de son savoir, et jamais il ne dédaigna de les communiquer. Autant il aimoit la discussion, autant il abhorroit la dispute. Tout ce qui sortoit de sa bouche empruntoit de son accent je ne sais quoi de piquant et d’agréable ; à