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tion, s’étaient en peu de temps rendu compte des relations qui existaient entre cet officier et le Commandant Commissaire impérial et le nommaient : te tavini no te tavana, c’est-à-dire le serviteur, le serf du gouverneur.

Quatre mois, à peine, s’étaient écoulés depuis l’entrée en fonctions du nouveau gouverneur et déjà la Confiance innée ou pour mieux dire filiale que les Tahitiens catholiques avaient toujours eue dans le gouvernement français s’était convertie en une terreur sourde qu’on ne saurait dépeindre : avec le temps cette terreur s’accrut au point d’empêcher un grand nombre d’entre eux de remplir leurs devoirs religieux. Interrogés sur les motifs qui les portaient à agir ainsi, ils répondaient : « Qu’ils avaient peur. » « Le gouverneur avait juré », disaient-ils, d’anéantir la religion catholique en Océanie. » Un blanc, un Européen, qu’ils ne nommaient pas tout d’abord, mais qu’ils désignèrent plus tard, à ceux en qui ils avaient une grande confiance par les mots te tavini, avait dit en parcourant les districts : « Le gouvernement ne veut plus de catholiques à Tahiti. Il ne leur donnera jamais d’emploi et il retirera leurs charges à ceux qui sont de cette religion. »

M. Caillet, alors chef d’état-major, venait défaire le tour de l’île, et voici le discours qu’il avait tenu au vieux et loyal Peeououe, chef catholique de Teahupoo, le plus noble de Tahiti après la reine Pomaré.

« Le gouvernement ne sera jamais content que des Tahitiens se fassent catholiques ; le gouvernement pense que ceux-là sont des gens faux et méchants, des hypocrites qui mettent le trouble dans les districts, mais il est content de ceux qui pratiquent le protestantisme et le gouverneur les protégera.

« Il est bon que tu ne pratiques pas le catholicisme. Moi je suis catholique et j’ai grandi dans cette parole, mais parce que je sais que c’est une fausse doctrine, ma pensée et ma foi sont protestantes. Je sais parfaitement que le catholicisme est faux. »

Le chef du district de Paea avait été influencé dans le même sens et un jour il disait : « Je veux conserver ma foi, mais on est bien méchant au gouvernement. »

Le chef de la police du même lieu, nouvellement baptisé, disait : « Je veux bien être catholique, mais je veux conserver mon emploi. » Il craignait d’être traité comme l’avaient été Teraï et Pouroua, agents de la police qui venaient d’être destitués, on ne sait pourquoi, si ce n’est parce qu’ils étaient catholiques.