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LE COMMERCE DES MISSIONNAIRES



Le prince voulut voir ces richesses immenses ;
Il ne trouva partout que médiocrité,
Louanges du désert et de la pauvreté.

(Lafontaine.)


S’il est une assertion qui ne s’appuie sur aucune base sérieuse, c’est celle qui impute à la congrégation de Picpus d’avoir fait exploiter, à son profit, les pauvres richesses de Mangarèva. Pour bien des gens qui n’ont jamais voulu se rendre compte des choses, et qui ont tiré leurs renseignements de sources aussi peu sérieuses et si peu dignes de foi que celles où a puisé M. de Kératry, c’est un vrai bonheur que de crier haro sur cette humble congrégation.

Ces gens s’indignent contre ces missionnaires qui, disent-ils, exploitent le « pauvre monde » et veulent acquérir des richesses contrairement aux prescriptions de Notre Seigneur Jésus-Christ. Or, il est à remarquer que les plus animés dans ces sortes de discours, sont ordinairement ceux qui n’ont aucune espèce de religion. S’ils sont chrétiens, ce n’est point leur faute, et leur volonté n’y est pour rien, car on les baptisa le lendemain de leur naissance. Plus tard, ils se sont empressés d’oublier tout ce qu’on leur avait appris lors de leur première communion, et, en parlant de ce qu’ils ne connaissent plus, ils disent, avec une conviction pétrie d’orgueil et de sottise, « qu’ils n’ont que du mépris pour cette religion catholique, apostolique et romaine, qui est une religion de bigots, de calotins, d’idiots, et qui ne sert qu’à enrayer les progrès de l’humanité. ».

Mais alors toutes ces criailleries qu’ils profèrent contre les missionnaires et contre le commerce qu’ils leur attribuent, à quoi viennent–elles ? puisqu’elles ne sont pas dans l’intérêt d’une religion qu’ils méprisent.

Est-ce que la loi civile défend à un prêtre de commercer, c’est-à-dire d’acheter pour revendre ?

Est-ce que si un prêtre catholique faisait le commerce et avait comme le révérend Pritchard, jadis ministre protestant à Tahiti, son magasin à côté du temple, la justice humaine aurait à s’en mêler ?