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Page:Chopin et Sand - Lettres, éd. Sydow, Colfs-Chainaye et Chainaye.djvu/101

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44. — George Sand à Jules Boucoiran[1]à Nimes.

Marseille, 11 mars 1839.

Cher Bouc ou hareng, je suis à Marseille. L’Espagne a réussi physiquement à Maurice, mais moralement, elle nous fait horreur à tous ! Ce qui s’y passe maintenant vous donne la mesure du caractère national, nous avons secoué la boue et le sang qui collent aux pieds sur cette terre abandonnée à l’anarchie, à la démence et à la cruauté.

Mon compagnon de voyage, Chopin, s’est trouvé bien mal de ce séjour. Sa santé déjà très compromise [2] avait empiré à Majorque d’une manière effrayante. Je l’ai ramené par mer à Marseille, la voiture lui faisant beaucoup de mal. Voilà pourquoi nous n’avons pas passé à Nismes et sommes ici où nous avons pour ami et médecin le Docteur Cauvière dont la réputation vous est arrivée certainement. Grâce à Dieu, Chopin est en pleine convalescence et nous pourrons dans un mois ou deux reprendre la route de Nohant. Nous passerons à coup sûr tout le mois de mars à Marseille. J’espère qu’étant si près de nous, vous viendrez nous voir. […] Adieu, mon enfant, à revoir bientôt n’est-ce-pas ? […]

  1. Premier précepteur de Maurice Sand.
  2. Exagération de la part de George Sand. La santé de Chopin n’était pas compromise à ce point au moment du départ pour Majorque. Par cette affirmation George Sand cherchait sans doute à diminuer, aux yeux de ses amis, la part de responsabilité qui lui incombait.