vous écrire tout de bon que mon baromètre marque quelque chose sinon de stable du moins de certain pour un temps quelconque. Je n’ai pas le plus petit reproche à faire mais ce n’est pas une raison pour être contente. Aujourd’hui je ne vous écris qu’un billet pour vous dire que je vous aime, que j’ai besoin que vous m’écriviez, que vous pensiez à moi, que vous vous occupiez de moi. Cette idée me donne de la force et m’empêche de retomber dans mes exagérations de désespoir sombre, bête et spleenitique.
Ma pauvre vieille Sophie [Cramer] est très malade, m’écrit-on. Vous qui êtes la Madone des affligés et la patronne des malheureux, vous la secourrez, n’est-ce pas, chère bonne, et veillerez à ce qu’elle ne manque de rien. C’est une bien bonne créature qui m’aime tendrement.
Permettez-moi aussi de vous demander un moyen d’envoyer chez Buloz. Il a mille francs à me remettre sur lesquels j’en dois cinq cents pour des emplettes que j’ai fait faire par le jeune Mallefille ; en outre Sophie a dépensé 182 francs environ pour la caisse qu’elle m’a envoyée dernièrement (et où, par parenthèse, j’ai trouvé mes walzes[1] dont je vous rends mille grâces). Je crains que d’un côté Mr Léonce Mallefille ne soit gêné pour le payement, et que, de l’autre, Sophie ne soit à sec. Ayez donc la bonté, chère, d’envoyer chez Buloz,[2]
- ↑ De Chopin sans doute.
- ↑ François Buloz, (1803-1877), directeur de la Revue des Deux Mondes ou pour parler comme les contemporains, directeur de la « Revue » car la Revue des Deux Mondes éclipsait toutes les autres. Buloz fut aussi, mais avec un succès infiniment moindre, « commissaire du Roi près la Comédie française » (1838-1847) dont il devint ensuite administrateur (1847-1848).