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en route

bien écrire un roman politique à clef, avec dedans des personnages dont le lecteur chercherait malgré lui à reconnaître le visage. Oui, j’appellerais ce livre : « Le Vampire », « Le Protée », n’importe.

J’y mettrais quelque type de bas-bleu, de calotin ou de carotteur, de garnement sans principes, sans foi ni loi, qui trahirait toutes les plus touchantes amitiés, parviendrait quand même à force de reniements et d’apostasies sans nom à étendre son audacieuse et insolente autorité… Il aurait des journaux, il aurait des suppots, il rançonnerait les dévouements les plus désintéressés et pareil à un infâme gueux se cacherait toujours, comme derrière un paravent, derrière un autre personnage que je rendrais magnifique et noble à cause de sa grandeur d’âme… Oh ! oui, il faudra pourtant que je le fasse un jour ce livre où il ferait si bon de peindre toutes nos ganaches politiques…

— Eh holà ! docteur, comment va ce pauvre vieux Baptiste ?…

C’est le père Legault, avec sa fourche tenue droite et solennelle comme une crosse, qui m’interpelle au passage, de l’autre côté de la clôture, debout auprès de son andain.

— Il se ravigote… il se ravigote,