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Claude Paysan

oh ! elle s’était mise à danser, à sauter, à embrasser son Claude comme une vieille folle… Et elle riait, riait la pauvre, en figure n’avait plus que vingt ans et il jaillissait du bonheur de ses petits yeux gris. Puis s’arrêtant soudain :

— Tu vas faire venir ton ami Jacques pour être ton garçon d’honneur ?…

— Jacques ?… Oh ! oui… Et alors ce fut Claude qui se mit à danser à son tour, à sauter, à embrasser la vieille Julienne.

… En effet, il avait écrit, et Jacques était accouru de là-bas, là-bas… les mains pleines de lingots d’or. Il en avait donné par poignées à Claude, à la mère Julienne. à p’tit Louis…

Alors ça avait été un jour d’allégresse infinie.

Par une matinée douce, où flottaient comme de l’encens les vapeurs pâles du Richelieu, ils s’en étaient allés en procession joyeuse à l’église du village. Et avec ses jolis habits de marié, son grand air fier qui défiait l’avenir, son large front couronné de ses épaisses mèches brunes, le paysan Claude avait l’apparence d’un roi… Il le fallait bien, pour se mettre à la hauteur de cette reine qui était Fernande et qui l’avait grandi jusqu’à elle en lui accordant son amour.

Les autres aussi avaient tous belle mine, jusqu’à la vieille Julienne qui, à force d’être heureuse, avait l’air presque pimpante sous sa robe neuve. Dans l’église, pendant les cantiques et les joyeux accords, elle avait beaucoup prié seulement la pauvre vieille, beaucoup prié pour les deux qui étaient à présent ses enfants.