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Claude Paysan
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nite. En ayant aspergé l’intérieur du logis, elle s’était signée avec ferveur ; Claude aussi avait fait un grand signe de croix de croyant. Et immobiles tous deux, sans rien dire, ils regardaient se déchaîner l’orage.

Toujours de plus en plus terribles les rafales, la pluie et les éclairs. La maisonnette furieusement secouée craquait comme si le toit allait s’abattre ; les éclairs farouches se glissaient sinistrement entre les volets ; l’eau coulait déjà en fusant le long des planches ; mais en dehors c’était encore plus affreux. En un clin d’œil, des cours d’eau, creusés ça et là à travers les pièces de grains, charriaient à la rivière les épis fauchés ou arrachés.

De temps en temps, les sifflements, le fracas assourdissant de la tempête, le martèlement de la pluie, ralentissaient jusqu’à presque cesser comme pour prendre haleine et, tout de suite, dans un raffinement de rage inassouvie, ça reprenait, ça augmentait, hurlant, frappant, secouant.

Tout à coup, dans une transition brusque, le vacarme d’enfer s’était accru d’un accompagnement grêle et étourdissant. C’était comme si le vent eut agité dans l’air des millions de milliasses de castagnettes… Et il faisait très froid.

Claude s’était levé, puis la vieille Julienne, lentement, comme dans une peur de regarder. Les castagnettes continuaient leur train de diable. Alors ils virent quelque chose de navrant.

Partout dans les champs, sur les coteaux, les épis tombaient écrasés, aplatis, croisant leurs tiges bri-