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XXI


C’est plus fort que moi, je sens bien qu’un jour je m’en irai, loin… là-bas… là-bas, avait dit Jacques dans une de ses heures de réflexion profonde. Et ce vilain jour, de juin et de soleil, trop beau pour ce triste départ, était arrivé.

La veille, sans pouvoir dormir, il avait longtemps songé aux mille choses qui le liaient et le retenaient encore aux rives du Richelieu. Mais en les repassant une à une, il avait senti qu’il allait pouvoir s’en détacher sans trop d’effort…

Pour une seule, oh ! celle-là, par exemple, il ne savait comment se raisonner pour se décider à s’en séparer. … Comment vivre en effet, sans l’amitié de Claude ?… Il voyait d’avance là-bas les étrangers et les indifférents à qui il faudrait peut-être se confier. … Non. pas un de ces inconnus ne remplacerait jamais son fidèle ami, et plus il y songeait, plus ceci lui faisait mal au cœur.

En dehors de ce côté pénible, chacune des raisons qu’il invoquait en lui-même raffermissait davantage ses résolutions de départ… C’est vrai, un an… deux ans, c’est si tôt écoulé… Il serait riche ensuite et il reviendrait… deux ans… un an… un an…

Alors, subitement, sous la lumière fumeuse d’une bougie, il avait, sans s’en apercevoir, entassé ses habits au fond d’une petite malle, étendu dedans ses