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Page:Choquette - La Terre, 1916.djvu/147

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rait, d’ailleurs de se voir perchée au sommet du voyage, rangeant et foulant le foin… » Elle était déjà prête à courir chercher Rougeaud…

Le père de Beaumont avait eu un instant de crainte en regardant les frêles mains qu’elle avait à mettre à la tâche, puis sans rien dire, il avait consenti. Seul, et en face du temps qui menaçait, il le fallait bien.

… Bientôt, secoués par les rigoles, les mains appuyées aux ridelles d’une haute charrette à foin, on les vit tous deux s’enfoncer dans la prairie. Et les veillottes commencèrent de voleter gaiement comme dans les champs voisins.

Longtemps ils restèrent sans se parler. Ils s’étaient compris sans phrases, se contentant d’analyser en eux-mêmes le spectacle qu’ils offraient à ce moment, lui, ce vieillard, et elle, cette frêle jeune femme, l’un et l’autre contraints au rude travail de la fenaison.

À la fin, le père de Beaumont s’enquit doucement : « Où est-il donc allé ? »

Après un vague haussement d’épaules, Marcelle pointa la main dans la direction du village : « Il est parti de bonne heure plein d’entrain, à la recherche d’un aide… Il devait revenir tout de suite, à cause de son foin… Mais vous savez… » elle acheva sa pensée dans un geste d’accablement.

— « De la si bonne terre qu’il a à cultiver » reprit le vieux en soupesant de sa fourche les veillottes généreuses et drues qu’il maniait en ce moment. « Il n’aurait pourtant qu’à se bien conduire pour