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L’ŒIL DU PHARE

être et de choses dites qui la surpassent. Mais sur le quai tantôt, quand elle a vu le vaisseau prendre le large, joyeusement pavoisé, à l’émerveillement de la foule curieuse et badaude, elle a commencé à comprendre que de loin on lui faisait des adieux.

Maintenant, après le départ de monsieur le curé, elle se retrouve seule au foyer de ses tristesses, avec la jeune voisine qui remplacera pendant ces jours son fils dans ses entretiens. Elle comprend mieux que la communauté de sentiments, entre mère et enfant, si intime et si absolue, qui faisait sa force et sa consolation, est pour la première fois en détresse ; que dans les attaches si nombreuses et si fortes de leurs cœurs quelque chose s’est irrémédiablement rompu. Cette première absence de Jean, cette cruelle séparation, qui l’a donc ainsi voulue ? Qui ? Jean lui-même ? Non. — Monsieur le curé ? Non ! Le cousin Émile ? Oui et non. — Celui qui l’a faite, à qui elle en veut, c’est son mauvais sort à elle, sa triste destinée cachée pour le présent sous les