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LA CIGALE DEVIENT FOURMI

fallait, l’idée juste du nombre de tous ceux à qui il devait son élection. Mais ils ne manquèrent pas de venir le lui apprendre, le rappeler souvent, même trop souvent. — « Ce que l’on s’était dévoué, ce que l’on avait travaillé pour lui, ce bon monsieur Larive, il ne s’en douterait jamais ; n’importe ! on avait gagné, toujours ! »

Pendant deux mois l’élu eut à subir cette obsession, à réfléchir sérieusement sur les ennuis de cette sorte de popularité que l’arriviste recherche pourtant. Inutile d’ajouter néanmoins qu’il n’en était pas encore à regretter, à méconnaître surtout la badauderie qu’il avait si bien su exploiter, qui l’avait fait vaincre son adversaire. Plus tard, peut-être, — qui sait ? aurait-il à déplorer amèrement cette griserie populaire qui décide des élections ; à s’écrier après Alphonse Daudet : « Ah ! la grande gamelle de la popularité, il fait bon s’asseoir devant, mais quel échaudement quand elle se renverse ! »