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Page:Christen - L'Hygiène dans l'armée japonaise, 1911.pdf/16

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fournissait 23 469 victimes à cette maladie ; presque un corps d’armée.

La fièvre typhoïde et la dysenterie ont été très rares, et cela s’explique par la nature de la boisson habituelle des Japonais, le thé. Quoiqu’ils aient utilisé des filtres de campagne de différents modèles, ils consommaient surtout, comme je vous l’ai dit, du thé et de l’eau bouillie. L’exemple leur était donné d’ailleurs par les officiers. Pendant les marches, je les ai vus souvent, écrit le Dr Matignon, au cours des haltes, garnir d’eau à un puits leur petit bidon d’aluminium, rassembler quelques branches, un peu de bois, allumer du feu et placer dessus le bidon qui bouillait en quelques minutes. L’exemple partant de haut était naturellement suivi par le soldat discipliné, respectueux de ses chefs et intelligent.

Pour éviter la dissémination de la dysenterie, les médecins japonais ont usé d’un stratagème extrêmement ingénieux. Deux bactériologistes japonais, MM. Tutsuki et Okada, avaient remarqué au cours de leurs expériences de laboratoire que la créosote est très peu favorable au développement du bacille de Shiga. Aussi chaque soldat était-il porteur d’une petite boîte en fer-blanc, contenant une quinzaine de pilules de créosote. Il était recommandé aux hommes d’en prendre une au moment de chaque repas ; mais comme on craignait que ces recommandations médicales ne fussent peut-être pas strictement observées, on avait recours à un artifice exploitant à la fois le chauvinisme et la superstition du troupier. Sur chaque boîte étaient estampés en caractères japonais ces mots : « Prenez trois de ces pilules par jour, c’est nécessaire pour vaincre les Russes » ; et les soldats les prenaient bien.

L’armée japonaise qui, dans sa campagne de 1895 en