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ÉTIENNE DOLET

Boyssone qui lui procura la somme nécessaire pour faire le voyage d’Italie et pour subvenir à ses besoins dans ce pays[1]. Au moment où les mêmes accusations furent dirigées contre lui, il était le seul membre influent de l’université sur lequel les amis de la science comptaient pour soutenir leur cause.

Il était donc de toute importance qu’il fût renversé. Il est évident que les réformateurs en tant que protecteurs des lettres avaient toutes ses sympathies ; et nous voyons, par sa correspondance, qu’il lisait régulièrement le Nouveau Testament — surtout les Épîtres de saint Paul — et qu’il était un admirateur ardent de saint Augustin. Ces faits, comme le dit judicieusement M. Guibal, « semblent accuser dans sa foi religieuse une tendance à se rapprocher du dogme luthérien ou calviniste de la justification par la foi ». Mais il était avant tout juriste et homme de lettres, et il prend un soin tout particulier dans ses lettres et dans ses poèmes de n’exprimer aucune opinion sur les questions religieuses qui s’agitaient alors. Il était d’un naturel prudent et timide, et peu disposé à dire son avis, même à ses amis les plus intimes, sur les sujets dangereux de controverse. Mais à Toulouse être homme de lettres à cette époque était passer pour hérétique. Il nous dit lui-même que seuls son amour de la littérature et son admiration pour les lettrés, ses amis, suffirent à donner lieu aux accusations d’hérésie dirigées contre lui"[2], et Dolet confirme ce fait dans son second discours[3]. « Quelle fut, dit-il, la cause des malheurs de Jean de Boyssone, si ce n’est son savoir et sa grande fortune ? Je l’affirme — ce n’est pas une simple rumeur, mais je l’ai entendu dire par des personnes de la plus grande honnêteté, et je l’ai appris par moi-même qui fus son ami intime — les persécutions dirigées contre lui ne se fondèrent que sur sa réputation de savant et d’homme riche. Il était innocent de la plus

  1. Boyss. : Man. Epist., fol. 110.
  2. Id., fol. 26.
  3. Dolet : Orat., p. 58.