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ÉTIENNE DOLET

d’un painctre[1] ». Il semblerait que Compaing fût accompagné par une bande de vauriens qui, après la mort du jeune peintre, essayèrent aussitôt de s’emparer de Dolet pour le livrer à la justice sous l’accusation de meurtre et qui excitèrent la foule à proférer cette accusation contre lui. Il est certain qu’il s’était déjà rendu suspect au moins aux yeux des autorités de Lyon, et que, s’il avait été arrêté et jugé dans cette ville, il aurait eu peu de chance d’être acquitté, quelque évidente que fût son innocence. Aidé par ses amis, il s’enfuit de la ville avant l’aube, ayant l’intention de se rendre à Paris pour y obtenir sa grâce du roi. Il nous a donné lui-même un récit de son voyage dans un poème latin où nous trouvons tout le détail de ses aventures :

« Lorsque Janus avec sa double face contemplait en même temps deux années, l’une qui se hâtait de finir, l’autre qui allait commencer, un ennemi perfide m’attaqua et me mit l’épée à la gorge ; je résistai à celui qui voulait être mon meurtrier et je tuai celui qui s’efforçait de me détruire par le fer.

  1. Je ne sais si le récit que Dolet donne de cette affaire est juste. Si, en se défendant simplement contre l’attaque imprévue d’un assassin, il tua son assaillant, nous ne pouvons guère comprendre pourquoi la cour de Lyon fit tant de difficultés pour enregistrer ses lettres de pardon. Voulté, il est vrai, assure à Jean de Pins, dans la lettre mise en tête du troisième livre de ses épigrammes, qu’il est certain que Dolet tua son adversaire en se défendant, et ce témoignage doit nous suffire pour croire que Dolet était réellement dans son droit ; mais il paraîtrait que l’affaire fût plutôt une querelle entre les deux hommes qu’une attaque faite sans provocation par Compaing dans l’intention de tuer Dolet. Compaing appartenait à une famille honorable de Lyon, et, bien que je n’attache aucune importance à l’accusation évidente impliquée dans les mots dont Floridus Sabinus se sert pour parler de cette affaire. (je dois dire que je ne sais pas au juste ce qu’il veut insinuer), il n’est guère probable que Floridus aurait parlé ainsi si Dolet et Compaing n’avaient pas été liés d’amitié à une certaine époque. Voici le texte de Floridus : « Atque inde fieri compertum habeo ut qui nihil umquam laudabile in vita feceris quod de deo animaque sentis caute omnibus palam non facias, ne scilicet in crucem continuo rapiaris : a qua non admodum abfuisti dum perjurus sicarius juvenem pictorem cum quo lenonia fide in gratiam redieris, etiam jacentem animamque inter tuas nefarias manus exhalentem *****KooxiV7)8ôv*** pugione confodisti vel unico illo exemplo innatam tibi immanitatem pulchre ostendens. » Adversus Doleti calumnias.