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CHAP. XVII. — LE GRAMMAIRIEN ET LE TRADUCTEUR

peu par le moyen et travail des gens doctes elle pourra estre reduicte en telle perfection que les Langues dessusdites A ceste cause, Seigneur tout humain, ie te requiers de prendre ce mien labeur en gré ; et s’il ne reforme totallement nostre langue, pour le moins pense que c'est commencement qui pourra parvenir à fin telle, que les estrangiers ne nous appelleront plus Barbares.»

Cette lettre est datée de Lyon (4 mai 1540) ; elle est suivie d’une adresse au peuple français, dans laquelle l’auteur explique le plan de son ouvrage, dont il n’offre qu’une partie pour le moment : « Depuis six ans, dit-il, desrobbant quelques heures de mon estude principalle (qui est en la lecture de la langue Latine et Grecque), te voulant aussy illustrer par tous moyens, i’ai composé en nostre langage un œuvre intitulé : L’Orateur Françoys, duquel œuvre les traictez seul telz: la grammaire, l’ortographe, les accents, la punctuation, la pronunciation, l’origine d’aucunes-dictions, la manière de bien traduire d’une langue en aultre, l’art oratoire, l’art poétique. Mais pour ce que le dict Œuvre est de grand importance, et qu’il y eschet un grand labeur, scavoir et extresme iugement, i’en differeray la publication (pour ne le précipiter) iusques à deux ou troys ans. Ce pendant tu l’ayderas des instructions qui sont ce présent livre. Lequel, si ie congnois t'estre agreable, ie seray plus enclin a te bien polir, et parfaire le demeurant de mon entreprinse. Combien que i’en attends plu tost contentement de la postérité que du siècle présent ; car le cours des choses humaines est tel, que la vertu du vivant est touiours enviée et déprimée par détracteurs, qui ne pensent advantager en réputation, s'ils mesprisent les labeurs d’autruy. Mais l’homme de scavoir et de bon iugement ne doibt regarder à telz resveurs, et plus tost s’en mocquer du tout. Ainsi faisant, ie poursuivray mon effort et attendray légitime los de la postérité : non d’aucuns vivants par trop pleins d’ingratitude et mauvais vouloir. Contente toy pour ceste heure (Ô peuple Françoys) de ce petit œuvre : et prens par pleige l'affection