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Page:Christie - Étienne Dolet, trad. Stryienski, 1886.djvu/371

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CHAP. XVII. — LE GRAMMAIRIEN ET LE TRADUCTEUR

choses en telle briefveté que la Latine. Parquoy si quelques foys j’use de circonlocutions commodes, tu ne le trouveras estrange, puis qu’aultrement ne se peult faire. Ce qui advient pour la diversité des Languies ; car ce que l’une exprime un mot l’aultre l’exprime en plusieurs. Et ce que icelle a en plusieurs, l’aultre l’a en une. En quoy il fault avoir raison de la phrase et propriété de chasque langue pour se trouver excellent interpréteur et parfaict. »

Les mérites de la traduction de Dolet étaient certainement grands; ce n'était pas une simple adaptation de la version de Guillaume Michel de Tours, qui est jugée par Dolet comme il convient et qui avait été publiée en 1537 et en 1539[1].

L’ouvrage de Dolet était la traduction personnelle d’un homme qui savait suivre les règles qu’il avait formulées lui-même dans la Manière de bien traduire. Il comprenait parfaitement le sens et l’esprit de Cicéron. Il comprenait parfaitement le latin et le français. Sa traduction est littérale quand les idiomes des deux langues le permettent. Il a soin, sans jamais s’en tenir à une trop scrupuleuse exactitude, de ne pas changer le sens réel des phrases, c’est à cela qu’il vise toujours, et encore qu’il n’essaye pas de traduire des mots comme auspices, augur, consul, dictator, il a soin, autant que le sujet le comporte, d’employer des mots bien français et non pas de simples formes modernisées de vocables latins.

Le livre de Dolet n’a rien de commun avec ces traductions si populaires du dix-septième et du dix-huitième siècle, qu’on a fort bien appelées les belles infidèles ; et dans lesquelles Pomponius devient Monsieur de Pompone, Trebatius, Monsieur de Trébace et Postumia tua et Servius noster, Madame votre femme et Monsieur votre fils. Le but évident du traducteur était alors d’écrire ce qu’il croyait que son auteur aurait du

  1. Guillaume Michel de Tours traduisit plusieurs auteurs grecs et latins en français, toujours également mal. Ses poèmes ne valaient pas mieux que ses traductions.