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ÉTIENNE DOLET

joyeux au chancelier pour lui dire comment, peu de temps auparavant, il a fait brûler un libraire nommé Jehan de la Garde avec ses livres, ainsi que « certaines autres personnes »[1], et pour lui témoigner le vif désir qu’il a de poursuivre Morin. Il allait même jusqu’à avoir un libraire à ses gages , un certain André, qui était chargé de découvrir et de trahir ceux qui vendaient et achetaient des livres hérétiques[2].

Heureusement pour le prisonnier, la sentence avait été prononcée à Lyon et non pas à Paris. Pour les cas d’hérésie, il était rare qu’un intervalle de plus de quelques heures séparât la sentence de son exécution, et un appel interjeté auprès du parlement, lorsqu’il pouvait être déposé et entendu immédiatement, ne servait qu’à hâter l’exécution et parfois même à augmenter la sévérité de la peine. Le 16 avril 1529 on condamna Berquin à un emprisonnement perpétuel. Il en appela immédiatement au parlement de Paris. Son appel fut entendu et rejeté le 17 au matin. Le parlement réforma le jugement et condamna Berquin à être brûlé vif, et la sentence fut mise à exécution le même jour dans l’après-midi.

Pierre Lizet étant président, il est probable qu’un appel au parlement n’eût pas été accordé ; il est certain que s’il était accordé, la condamnation devait être confirmée, mais au moins on gagnait du temps et l’on pouvait alors s’adresser personnellement au roi. Un appel venant de Lyon ne pouvait être rejeté avec cette hâte inconvenante dont on avait fait preuve pour Berquin. Il fallait que l’appel fût déposé, que le prisonnier et les pièces du procès vinssent de Lyon. Heureusement Jean de Peyrat était encore lieutenant gouverneur et il allait prendre soin qu’on attendît autant que possible avant de mettre le feu au bûcher. C’est lui qui, nous l’avons vu plus haut, avait causé le retard apporté à l’exécution de Baudi-

  1. L’une des «autres personnes» était un jeune homme de vingt ans. Sleidan donne un récit de son exécution. «Tolosanus adolescens nobilis et literarum studiosus» (Comment. lib. XII).
  2. Crespin : Grand Martyrologe (édit. de 1597), p. 177.