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ÉTIENNE DOLET

ou trois grands noms du seizième siècle, il a droit certainenement à une haute place. Et quoiqu’il ne soit pas l’écrivain latin consommé qu’il se flattait d’être et qu’il manque de sens critique, il n’en est pas moins vrai qu’il était un érudit au sens où on prenait ce mot à cette époque, qu’il a fait preuve d’un grand savoir, d’un profond sentiment de l’antiquité, d’un travail infatigable et du désir ardent de rendre sa science utile aux autres. Ses commentaires furent l’un des plus importants ouvrages d’érudition latine que la France eût donnés jusque-là. Ses Formulæ, ses critiques sur Térence, et ses traductions doivent être comptées au nombre des ouvrages les plus remarquables de cette catégorie. Dire que ses ouvrages latins appartiennent plutôt à la rhétorique qu’à la science et montrent une recherche de forme plutôt qu’une recherche de fond, c’est dire tout simplement que c’étaient les ouvrages d’un érudit de la Renaissance, d’un érudit de la première partie du seizième siècle. Ses vers latins ne sont ni meilleurs ni pires que ceux de la plupart de ses contemporains[1]; et s’il ne s’élève jamais à la


    Vierge, lisant ses Heures et pratiquant ses devoirs de piété avec autant de candeur qu’un digne chanoine ». Il est évidemment possible que le livre ait appartenu à Étienne Dolet, encore que la devise qui s’y trouve ne puisse guère être considérée comme une preuve concluante (elle ne peut donner lieu qu’à une supposition) ; je ne saurais pour ma part y voir un renseignement évident sur ses opinions religieuses ou sur la manière dont il pratiquait ses devoirs de piété.

  1. Le jugement de Buchanan est très peu favorable, mais c’est plutôt le fond que le style qu'il critique. Voici ses deux épigrammes sur Dolet :

    «Carmina quoi sensu careant, mirere Doleti ?
    Quando qui scripsit carmina, mente caret !»
    «Verba Doletus habet quis nescit ? splendida : verum
    Splendida nil prœter verba Doletus habet »!

    Pasquier n’est pas plus indulgent, il dit de lui :

    «Cui placuit nullus, nulli hunc placuisse necesse est ! »

    C’est un peu de l’ingratitude, car l’idée aussi bien que la forme d’un long passage des Recherches de la France de Pasquier (livre VII, chap. VI) est évidemment empruntée à une digression des commentaires de Dolet, citée plus haut, pages 245-250. D’autre part, Macrin — l’Horace français — le classe avec Brice, Dampierre, Bourbon et Voulté, et parle de ses vers en termes très louangeux. Le lecteur qui voudrait connaître à fond l’opinion de ses contemporains