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CHAP. IV. — TOULOUSE

« L’Inquisiteur de tout le royaume de France, nommé spécialement par le Saint-Siège Apostolique et par l’autorité du roi » (tel était le titre conféré à l’inquisiteur général par le parlement), tenait sa cour à Toulouse et jouissait là uniquement d’une puissance incontestée[1]. Non seulement les gouverneurs du Languedoc, mais les rois de France eux-mêmes ne pouvaient entrer dans Toulouse sans avoir fait, devant l’inquisiteur, un serment par lequel ils s’engageaient à maintenir la foi et à soutenir le Saint-Office.

Après la place Maubert à Paris, il n’y a pas d’endroit en France où, à l’époque de la Réforme, on brûla autant de gens éminents que sur la place de Salins à Toulouse. En 1532, elle fut le théâtre du martyre de Jean de Caturce, en 1538, on y vit périr Louis Rochette, le grand inquisiteur lui-même qui, ayant adhéré aux doctrines de la Réforme qu’il avait réprouvées pendant tant d’années, connut les effets de ce baume précieux que l’église réserve à ceux de ses enfants qui s’écartent du vrai chemin. Ce fut Toulouse qui, en 1562, devança la Saint-Barthélémy en massacrant les huguenots et en délivrant ainsi la ville de cette secte malfaisante. Ceux qui échappèrent aux assassins furent mis à mort par ordre du parlement et une fête annuelle fut instituée pour garder le souvenir de cet heureux événement ; elle fut confirmée ensuite par une bulle du pape Pie IV, qui accordait des in-

    ravant. En 1645, l’archevêque d’alors, Charles de Montchal, jaloux d’une autorité rivale, obtint un décret du roi par lequel l’inquisition était privée de sa juridiction. Le titre d’inquisiteur général, qui donnait un grand prestige et quelque pouvoir réel, fut maintenu jusqu’en 1772. C’est alors que le marquis d’Aignan d’Orbessan, président à mortier du parlement de Toulouse, honteux de voir que l’inquisition existait encore en France, obtint un décret du roi qui la supprima. Hist. de l’Inquisition en France, par E. L. B. de Lamothe-Langon.

  1. Malgré les tentatives de l’inquisition pour obtenir cette juridiction absolue, elle ne put jamais étendre son autorité au delà du Languedoc et des pays adjacents. Elle ne fut jamais reconnue par le parlement de Paris, ni par celui de Dijon ou de Bordeaux, bien que, comme cela arriva pour Dolet, l’inquisiteur général tînt parfois sa cour dans les limites de la juridiction de ces parlements, agissant, pour ainsi dire, comme l’officiel de l’évêque ou comme liseur de l’officiel.