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CHAPITRE X.

passé. Les reliques vénérées de saint Étienne, conservées par la pieuse femme qui les avait recueillies en 1567 et déposées ensuite par elle entre les mains du prieur de Saint-Germain, frère Pierre Duchesne, étaient portées en grande pompe dans la nouvelle châsse due à la générosité des fidèles et au retour « mises et posées en la dicte église de Saint-Germain bien décemment et en lieu honneste pour y estre enfermées et gardées, afin d’y estre cy-après par le peuple révérées et honorées, pour, implorant leur aide et secours, obtenir par leur intercession ce qui lui sera nécessaire pour la direction et la conduite de la vie[1]. »

Dourdan se réjouissait de retrouver, avec le culte de son saint patron, le gage d’un heureux avenir et comme le palladium de ses anciens jours.

Quant au château, le plan complet d’embellissement de Sancy n’était point exécuté, mais des améliorations intérieures y étaient faites. C’est Sully qui, jugeant sans doute l’ère des siéges finie pour Dourdan, ordonna, en 1608, de combler la partie du fossé qui séparait le donjon de l’intérieur de la forteresse, et condamnant la grosse tour à n’être plus qu’une habitation pacifique, la relia par un terre-plein au sol de la cour et permit ainsi d’entrer directement par la porte du premier étage qu’on n’abordait auparavant que par un pont-levis. Sully voulut peut-être, en faisant exécuter ce travail, utiliser les apports de terre du capitaine Jacques ; nous croyons surtout qu’il trouva là l’occasion de donner une occupation lucrative à de pauvres habitants ruinés par la guerre. Ce genre de bienfaisance était dans les habitudes de Sully[2]. C’était la duchesse qui, d’après les historiens, « s’occupait de surveiller ces travaux, de faire dresser les baux et recevoir les comptes des fermiers et des receveurs ; c’était elle qui faisait dans les terres de son mari presque tous les voyages nécessaires. » (Mém., p. 403.)

  1. Lettre de Philippe Hurault, évêque de Chartres, du 22 septembre 1609, à la requête du prieur, gagers, manans et habitans de la paroisse, et après enquête de Mrs Hierosme le Beau, chancelier, chanoine et officiai de Chartres, « par laquelle appert de la recognoissance faicte par un grand nombre de témoings de luy enquis ; ensemble des graces faictes à une infinité des habitans de la ville qui auroient esté guaris et receu allegement en des extresmes et désespérées maladies, mesme au mois d’aoust dernier, leur estant ledict Reliquaire apporté par ledict Duchesne ou ses vicaires ; ledict Duchesne ayant iceluy réservé le plus honnestement qui luy auroit esté possible, attendant la commodité de le faire recognoistre. »
  2. Dans le supplément à ses Mémoires, nous lisons qu’il fit faire ainsi dans sa terre de Villebon un étang de trois cent soixante toises de long. « On recevoit indifféremment tous ceux qui s’offroient pour ce travail, et jusqu’aux plus petits enfants, auxquels on ne donnoit quelquefois pas plus d’une demi-livre de terre à porter : on avoit eu la précaution de faire faire pour cet effet un nombre infini de hottes de toutes grandeurs. On distribuoit à tous ces pauvres, le matin un morceau de pain, à dîner une grande écuellée de soupe, et le soir, outre un morceau de pain, un salaire en argent proportionné à l’âge et au travail. Cet ouvrage, que le duc de Sully n’auroit jamais entrepris pour le seul embellissement de sa maison, lui coûta quatre-vingt mille livres. » Mémoires, Londres, 1778, t. VIII, p. 406.