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LA VILLE.

aux assises de grès et au portail cintré[1]. Le jardin va jusqu’aux remparts, coupé par une ruelle qui permet aux habitants de la rue Basse-Foulerie de venir puiser de l’eau à la fontaine Saint-Germain. La rue se resserre en arrivant à l’église, la taverne de la Pomme de Pin s’ouvre en face du portail et les chantres s’y rafraîchissent en passant. Nous sommes revenus au point de départ, devant la porte du château ; c’est maintenant le tour de la ville haute.

La rue de Chartres commence aux halles et mène à la porte de Chartres. C’est, avec la rue Saint-Pierre dont elle est le prolongement, la grande rue de Dourdan, celle des magasins achalandés et des étalages du samedi. La proximité du marché a engagé les hôteliers à s’établir sur son parcours. Que nos lecteurs ne se scandalisent pas d’entendre toujours parler d’auberges. L’auberge est un centre de vie, de mouvement, d’activité commerciale ou politique. Il s’y échange des nouvelles et des produits. Si les braves cultivateurs et artisans y boivent un peu trop du vin des vignobles de Dourdan, ils y font en revanche beaucoup d’affaires, et d’ailleurs les chemins de Beauce sont si mauvais qu’il est souvent impossible de repartir le soir et qu’il faut nécessairement coucher à la ville, bêtes et gens[2]. Près de l’hospice, en face des halles, la Fille qui perd son temps a, depuis un siècle déjà, retiré son enseigne, mais tout à côté la maison de la Grille, où pendait, au xve siècle, l’Image sainte Barbe, continue à recevoir sa bruyante clientèle. Là, de tout temps, ont logé les Limousins, les bateleurs, meneurs d’ours et marchands de chansons, et la Grille, avec ses charpentes apparentes décorées de moulures, son portail cintré, ses quatre corps de logis ayant sortie sur la rue Trifouillet et la ruelle du Saint-Esprit, est une sorte de caravansérail où la maréchaussée a eu quelquefois affaire[3]. Peu après, l’Écu et la Pie dont la cour seule subsiste, forment un dédale de ruelles et d’allées courantes qui rejoignent la rue Neuve.

Au coin de la rue du Bon-Saint-Germain et de la rue de Chartres, en face du boulevard du Château à l’angle duquel voltige le Pot d’Étain au-dessus d’une treille bien palissée, le Croissant ouvre sa grande porte et sa cour étroite aux voyageurs bourgeois. La salle basse est assez

  1. Maison de la pension. — Très-anciennement auberge des Trois Maures ; déclarée au terrier de 1537 par la famille Sédillon, elle a appartenu à messire Pelault, à Jean-Raphaël Curé, lieutenant des eaux et forêts ; à Jean-Louis Pommier, ingénieur du roi. Elle était occupée, à la fin du xviiie siècle, par M. Sébillon, maître de pension. C’est aujourd’hui un pensionnat de demoiselles.
  2. Nous n’avons pas besoin d’ajouter qu’évoquant ici les souvenirs du passé, nous n’entendons pas dire que toutes ces maisons aient existé à la fois.
  3. Tenue à rente au xviie siècle par la famille Houssu de noble homme Nicolas Boitet, la maison de la Grille fut donnée en 1741, par les dames Bigé, à l’hospice, qui l’engagea peu après par bail emphytéotique. C’est aujourd’hui un beau magasin de nouveautés, tenu par M. Hattier.