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CHAPITRE XX.

Vieille et honorée, la respectable dame Servin achevait sa vie au milieu de ses bonnes sœurs et de ses chères élèves ; les habitants de Dourdan aimaient à la voir avec ses religieuses assister dévotement à tous les offices de la paroisse Saint-Germain, dans son banc modestement placé au bas de la nef, devant la première arcade à gauche, tout auprès des anciens fonts baptismaux[1]. Elle portait, comme ses sœurs, le costume entièrement noir choisi par elle et en tout conforme à celui qu’avait adopté la reine mère Anne d’Autriche : robe d’étamine ou de voile, bonnet de gaze noire, fichu et grande coiffe de taffetas noir, avec une petite croix d’or[2]. Elle s’éteignit en odeur de sainteté, le 25 septembre 1723, à l’âge de soixante-quatorze ans, consolée par le vieil abbé Mayol, vénérable prêtre qui était attaché comme chapelain à la maison[3].

Pendant un siècle, les filles de l’Instruction chrétienne continuèrent tranquillement leur tâche[4]. Fondée en octobre 1693, la maison de la rue d’Authon était bouleversée en octobre 1792. Par ordre émané du comité révolutionnaire établi à Dourdan, Mme Gaudry et ses sœurs durent précipitamment quitter leur asile, dont l’oratoire avait déjà été dépouillé de ses ornements et de ses vases sacrés. Sauvant à grand’peine quelques lits, quelques meubles et un peu de linge, obligées de quitter leur habit religieux, les pauvres filles se cachèrent. Quelques-unes essayèrent d’ouvrir de petites écoles particulières, mais, visitées et suspectées comme mauvaises institutrices « républicaines, » elles durent se disperser.

Leurs biens, séquestrés d’abord, furent vendus. Deux pièces de bois (environ 6 hectares) qui leur appartenaient furent réunies aux forêts de

  1. Concessions de banc, d’octobre 1703. — Archives de l’Église.
  2. On conserve à la communauté un pastel où Mme Servin est représentée sous ce costume qui encadre fort bien sa noble et intelligente figure.
  3. À la mort de l’abbé Mayol, la supérieure, dame Marie-Thérèse Caron, sœur Saint-Bernard, avec dix autres sœurs, tiennent chapitre pour accepter comme chapelain le cinquième vicaire que la paroisse offre de prendre pour faire les petites écoles, à la charge que ces dames lui donneront par an 161 livres 16 sols. — Archives de l’Église.
  4. On vit tour à tour se succéder, comme supérieures, de modestes femmes dont les noms ont été honorés par plusieurs générations : Anne Rémi, sœur de la Passion. Madeleine Bouvin, sœur Saint-Claude. — Thérèse Caron, sœur Saint-Bernard. — Anne Bosseau, sœur du Calvaire. — Marguerite Marville, sœur Sainte-Cécile. — Marie Raoul, sœur Saint-Joseph. — Angélique Gaudry, sœur de la Passion. Des jeunes filles de la meilleure bourgeoisie de la ville, Mlles Lequeux, Le Camus, etc., furent sœurs de l’Instruction chrétienne. De nobles dames, reçues à titre de pensionnaires, finirent leurs jours dans la maison, et des donations, qui d’ailleurs ne furent jamais bien considérables, aidèrent la communauté à fournir sa tâche. Dès 1697, l’évêque de Chartres avait attribué aux sœurs de Dourdan un legs qui lui avait été fait par Mlle Marie de Mainville, d’une petite rente et d’une maison dite l’Hermitage, à Saint-Martin-de-Bretencourt, destinées à l’entretien d’une institutrice, et deux sœurs avaient été détachées à cet effet. — Les ducs d’Orléans voulurent faire quelque chose pour les pieuses filles de la rue d’Authon, et leur concédèrent six cordes de bois à prendre chaque année dans la forêt (17 mai 1743).