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CHAPITRE XXV.

de la noblesse, Pajot fils, secrétaire-adjoint, de Broglie prince de Rével, présidant l’ordre de la noblesse[1].

Le lundi 30 mars, à quatre heures, une dernière séance générale se tint dans la chapelle de l’Hôtel-Dieu. Après trois discours du prince de Broglie, de M. Millet et de M. de Gauville, les députés élus prêtèrent leur serment.

Nous ne suivrons pas dans le cours de leur mission les délégués de Dourdan. Figurant à Versailles, à la procession du 4 mai, avec son costume à la Henri IV, qui, bien que des plus simples, lui coûtait 1,300 l., M. de Gauville se vit tout d’abord les mains liées par le mandat impératif qu’il avait reçu de ne point voter par tête et dut s’abstenir. Le 25 juillet, après le triste départ du roi, une lettre de convocation de l’ordre de la noblesse le rappelait à Dourdan pour trancher cette grave question.

« Le 27, lisons-nous dans le journal du sage député, je me rendis à ma terre de la Forest-le-Roy. J’appris en arrivant que j’étais dénoncé ; que les paysans de mon village, persuadés que ma tête était à prix pour une somme d’argent, disaient hautement qu’ils n’étaient retenus que parce qu’ils croyaient que j’avais amené une compagnie de dragons pour me fortifier dans mon château. Cependant les membres de la noblesse s’assemblèrent. Malgré les instances de mes parents, et bien convaincu que le plus souvent les bruits populaires ne sont rien quand l’homme innocent paraît, je montai à cheval et je me rendis seul et sans armes sur la place de la ville de Dourdan : là, je trouvai le peuple assemblé : on me reconnut, on me nomma ; la milice bourgeoise m’arrêta un moment et me fit entrer au château où était convoquée la noblesse et je ne reçus aucune insulte. L’assemblée était peu nombreuse. Je rendis compte de ma conduite et j’engageai mes commettants ou à prendre ma démission ou à me délier absolument de tout ce que mon mandat avait d’impératif, les circonstances étant telles qu’on n’avait pu les prévoir. Ils m’accordèrent tout ce que je demandais, approuvèrent ma conduite, et celui qui présidait l’assemblée, M. Roger fils, auquel je me plais à rendre ici la justice que mérite son esprit de conciliation, fit afficher dans la ville que l’ordre de la noblesse, par mon organe, était plus occupé du bien général que de son intérêt particulier. L’assemblée prit ensuite un arrêté que je devais porter à l’Assemblée nationale. Je remontai à cheval par une pluie affreuse qui contribua à dissiper la multitude et je me rendis le jour même à Versailles[2]. »

  1. On remarquait l’absence de Lally-Tollendal, du vicomte de Prunelé, du vicomte de Selve, du marquis de Gouvernet, etc.
  2. M. de Gauville siégea avec la droite jusqu’au 1er juillet 1790. Sa santé et sa conscience lui firent donner alors sa démission. Émigrant en 1791 il servit dans l’armée de Condé. Rentré en 1814, il mourut en 1827 dans sa retraite de Châlons-sur-Marne. Il a laissé des petits-enfants ; son petit-neveu, M. le vicomte de Gauville, est aujourd’hui préfet du Gers.