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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

eust mis et institué un appelé frère Jehan Chardebuef, lequel frère Jehan gouverna ledit prioré par l’espace de deux moys ou environ, pendant lequel temps le dit frère Martin ne se volt départir dudit prioré jusques à ce que le dit abbé le mist et fist mener hors de sa terre par delà Orliens, et il soit ainsique quinze jours après ou environ ledit frère Martin retourna à Dourdan près dudit prioré et ou pays d’environ, et quant il vint à la cognoissance dudit frère Jehan que le dit frère Martin estoit ainsi retourné, lui pria et dist moult amiablement qu’il alast prendre de telz biens qu’il avoit ou dit prioré et il lui en donroit voulentiers, lequel frère Martin respondi qu’il n’y vouloit point aler, et à un certain jour subséquent un charetier, qu’il avoit demouré avecques le dit frère Martin comme son compaignon, lia son cheval à la barrière et donna à entendre au dit frère Jehan que le dit cheval estoit adire et qu’il ouvrist la porte pour le aler quérir, lequel frère Jehan luy ouvry, et le dit charretier s’en yssy et ala à Dourdan, qui n’est pas à demie lieue ou plus dudit prioré, où estoit ledit frère Martin, et, après ce, ledit frère Martin dist audit suppliant, à Colin Charlot et à un compaignon Breton, qui là estoient alez jouer et esbatre qu’ilz alassent avecques luy à Louyee et après il leur tenroit compaignie jusques à Corbereuse, lequel suppliant qui ne pensoit pas le mauvais propos dudit frère Martin, sans porter cousteau ne baston, s’en ala avecques ledit frère Martin et les autres compaignons oudit prioré, et ainsi qu’ilz entroient en la porte dudit prioré, ilz trouvèrent ledit frère Jehan près de la dicte porte, auquel le dit frère Martin escria à mort, à mort, et en ce criant, ala soudainnement contre ledit frère Jehan et le frappa d’un demy glayve dessoubz l’aiselle, de quoy assez tost après mort s’en ensuy en la personne dudit frère Jehan ; pourquoy les diz supplians et Charlot s’en fouyrent et furent tous esbahis, quant ilz virent l’outraige dudit frère Martin, pour lequel fait ledit suppliant, doubtant rigoreuse justice ou trop longue detencion de prison s’est absentez du pays, et est en grant péril et doubte d’estre bannis de nostre royaume. Si nous a fait humblement requérir que, comme en touz ses autres faiz ait tousjours esté de bonne vie et honneste conversacion et que audit frère Jehan ne fery ne hurta ne n’avoit intencion du faire, mais ignoroit du tout, quant il y ala, le mauvais propos dudit frère Martin, et fut très parfaitement dolent et couroucié en cuer, quant il vist ledit fait ainsi avenu, et aussi considéré l’aage dont il estoit pour lors, c’est assavoir de dix huit ans ou environ, nous luy veillions sur ce impartir nostre grâce et miséricorde ; Nous, ces choses considérées, à ycelluy suppliant, ou dit cas, avons remis, quitté et pardonné, et par ces présentes, quittons, remettons et pardonnons le dit fait, de nostre grâce especial et auctorité royal, avec toute offense, peine et amende corporelle, criminelle et civile, que pour ce il puet estre encouru envers nous, et le restituons à sa bonne fame, renommée, au pays et à ses biens non confisquez, satisfaction faicte à partie, se aucune en y a, premièrement et avant toute euvre. Si donnons en mandement à nostre bailli de Chartres et à touz noz autres justiciers, à leurs lieuxtenans présens et avenir et à chacun d’eulz, si comme à luy appartendra, que ledit suppliant facent, souffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre présente grâce et rémission, et contre la teneur d’icelle ne le molestent ou empeschent en aucune manière, mais se son corps ou ses biens non confisquez sont, pour ce présens, detenuz, saisiz ou arrestez, si les