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DE GUILLAUME DE NANGIS

nuit même s’enfuit avec un petit nombre de gens. Les Grecs, apprenant sa fuite, s’assemblèrent dans le palais, et on élut solennellement le jeune exilé. Le matin venu, ils ouvrent les portes, et, entrant sans armes dans le camp des Français, ils demandent celui qu’ils viennent d’élire, et, le recevant aussitôt, ils délivrent Cursat son père de la prison ou il était renfermé. Cela fait, ils paient le prix des vaisseaux et les dettes des Français aux Vénitiens, et donnent aux Français et aux Vénitiens deux cent mille marcs. Ayant passé là l’hiver avec les Grecs, ils renouvelèrent et confirmèrent les conventions au sujet de l’obéissance à l’Église romaine, et des secours à accorder à la Terre-Sainte.


[1204]

Depuis la fin du mois de janvier jusqu’au mois de mai, il y eut une sécheresse continuelle et une chaleur ardente comme celle de l’été. Philippe, roi de France, assiégea Rouen. Il pressa tellement cette ville par des assauts que les citoyens, voyant qu’ils ne pouvaient eux-mêmes se défendre ni obtenir de secours du roi d’Angleterre, se rendirent a lui. Les deux châteaux de Verneuil et d’Arques, qui avaient résisté jusque là furent livrés au roi de France ; en sorte que le roi, maître de toute la Normandie, composée de sept diocèses, la réunit au corps de son royaume, trois cent trente-deux ans après que le roi Charles, surnommé le Simple, l’avait donnée avec sa fille au Danois Rollon, qui, le premier des ducs normands, reçut le baptême avec le nom de Robert. Ensuite, presque toute l’Aquitaine, avec la ville de Poitiers, se soumit au roi de France. Le corps du royaume s’augmenta ainsi en peu de temps ; et partout où le roi s’avança, il marcha sous