Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/136

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les chaînes du démon ; tout à coup ils lui ont mis le pied sur la tête, ils lui ont commandé et l’ont flagellé. Ces captifs, ces esclaves des démons, sont devenus des natures divines, des natures d’anges et d’archanges. Ces êtres, qui ne savaient même pas ce que c’est que Dieu, sont allés s’asseoir sur le trône de Dieu.
Voulez-vous voir quels degrés innombrables ils ont franchis ? Ils ont dû apprendre d’abord que les pierres ne sont pas des dieux ; que la pierre, loin d’être dieu, est même au-dessous de l’homme, qu’elle est même au-dessous de la brute, qu’elle est même inférieure à la plante ; que c’était sur le dernier degré de l’échelle des êtres qu’ils avaient choisi leurs dieux ; que non seulement ni la pierre, ni la terre, ni l’animal, ni la plante, ni l’homme, ni le ciel, mais, pour monter plus haut, que ni la pierre, ni l’animal, ni la plante, ni les éléments, ni la matière qui est au-dessus de nous, ni celle qui est au dessous, ni l’homme, ni les démons, ni les anges, ni les archanges, ni aucune de ces puissances célestes ne doivent être pour le genre humain les objets d’un culte. Ils ont dû fouiller, pour ainsi dire, dans les abîmes de la science, pour apprendre que c’est le Maître de l’univers qui est Dieu, qu’il a seul droit à nos hommages, qu’il est beau de savoir bien régler sa vie, que la mort actuelle n’est pas la mort, que la vie d’ici-bas n’est pas la vie, que notre corps ressuscite, qu’il devient incorruptible, qu’il monte au ciel, qu’il parvient à l’immortalité, qu’il est à côté des anges auprès desquels il se trouve transporté. Cet être placé ici-bas, Dieu lui a fait monter et franchir tous les degrés pour le placer sur le trône : cet être qui était au-dessous de la pierre, Dieu l’a mis au-dessus des anges, des archanges, des trônes et des dominations. Oui, il a eu raison de dire : « Les richesses de la gloire de ce mystère ».
En comparaison de cette science, la Science des anciens philosophes n’était que folie : tout ce que les philosophes pourraient dire ici serait inutile. Car le style de Paul a ici une grandeur infinie : « Quelles sont », dit-il, chez les gentils, « les richesses de la gloire de ce mystère », qui est le « Christ résidant en vous ? » Les gentils devaient apprendre en outre que celui qui est au-dessus de tout, qui commande aux anges et qui étend son empire sur toutes les puissances, s’est abaissé jusqu’à devenir un homme, a enduré d’innombrables souffrances, est ressuscité et monté au ciel.
2. Voilà tout ce que renfermait ce mystère. Et, pour en faire l’éloge, il ajoute : « Qui est le Christ résidant en vous ». Mais s’il est en vous, à quoi bon aller chercher les anges, pour vous l’enseigner ? « De ce mystère ». Il y a d’autres mystères encore. Mais ce mystère-là est bien le mystère inconnu, le mystère admirable qui surpasse toute attente, le mystère qui était caché au monde. « Qui est », dit-il, « le Christ résidant en vous, l’espérance de votre gloire », le Christ que nous vous annonçons, en faisant descendre sa doctrine du ciel : c’est nous qui vous l’annonçons ; ce ne sont pas les anges. « C’est lui que nous prêchons, reprenant tous les hommes ». Nous ne vous commandons rien ; nous ne vous imposons pas la religion du Christ ; car c’est encore ici un effet de la bonté de Dieu, de ne pas tyranniser les âmes. Pour atténuer ce que ce mot « nous prêchons » peut avoir d’ambitieux, il ajoute : « Reprenant » tous les hommes. C’est la réprimande d’un père plutôt que celle d’un maître. « Que nous annonçons », dit-il, « reprenant tous les hommes et les instruisant dans toute la sagesse », ce qui veut dire, les instruisant dans toute espèce de sagesse ou leur parlant toujours avec sagesse. Il faut donc ici une sagesse accomplie ; car il m’est pas donné à tout le monde d’apprendre de tels mystères. « Afin que nous rendions tout homme parfait en Jésus-Christ ». Que dites-vous, Paul ? vous voulez rendre tous les hommes parfaits ? Oui, c’est là le désir le plus cher de l’apôtre. Quand même il ne réussirait pas, saint Paul veut guider tous les hommes vers la perfection. Oui, vers la perfection ; mais l’œuvre de Paul est encore imparfaite et elle le sera, tant que tous les hommes ne seront pas complètement sages. « Tout homme parfait en Jésus-Christ » ; non dans la connaissance de la loi, non dans la connaissance des anges ; car ce n’est pas là la perfection ; mais « en Jésus-Christ », c’est-à-dire dans la connaissance du Christ. Bien connaître les actions du Christ, c’est être plus sage que les anges. « En Jésus-Christ ».
« C’est aussi la fin que je me propose dans mes travaux et dans mes luttes ». Je ne poursuis pas mon œuvre, dit-il, avec mollesse et tant bien que mal ; je travaille, je lutte avec zèle, c’est-à-dire sans épargner mes veilles.