Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/15

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et par intervalles, c’est toujours, c’est depuis l’époque où vous avez reçu la foi, jusqu’au jour présent, que vous prenez une part ardente au zèle et au prosélytisme des apôtres. Et cependant, à l’encontre, voyez comme ses collaborateurs de Rome l’avaient quitté ; écoutez comme il se plaint à Timothée, d’ailleurs : « Vous n’ignorez pas », lui dit-il, « que tous ceux qui sont en Asie se sont éloignés de moi » ; et encore : « Démas m’a abandonné, et dans mon premier procès, personne ne m’a assisté ». Au contraire, il atteste que les Philippiens, malgré les distances des lieux, ont pris part à toutes ses traverses ; qu’ils lui envoyèrent des messagers, lui fournirent aide et secours dans la mesure de leurs forces et de ses besoins, sans oublier ni négliger quoi que ce fût. Et vous le faites, ajoute-t-il, non seulement en ce jour, mais sans cesse et toujours, m’aidant de tout moyen. Voilà l’aide qu’il désigne sous le nom de « communion au saint « Évangile ». C’est qu’en effet, quand le prédicateur annonce la sainte parole, vous qui lui prêtez votre concours, vous aurez avec lui mêmes couronnes. Dans les combats simulés des jeux profanes, la couronne n’est pas décernée seulement au combattant, mais à son maître instructeur, mais à ses seconds mêmes, à tous ceux enfin qui ont formé le vaillant athlète. Puisqu’il leur doit, en effet, force, soulagement, n’est-il pas juste qu’il les fasse participer à sa victoire ? De même encore dans les guerres sérieuses, l’auteur d’un coup heureux n’est pas seul admis à recueillir la gloire et les trophées : on ne ferait pas cette injure à tous ceux qui lui ont prêté leur utile concours ; on reconnaît, on avoue, en les couronnant avec lui, que leur œuvre et leur service les ont comme associés au combat. Par la même raison, se mettre au service des saints est une œuvre noble et puissante, loin d’être à dédaigner : elle nous donne droit avec eux aux récompenses que Dieu leur tient en réserve.
Un riche, par exemple, s’est dépouillé d’une immense fortune pour l’amour de Dieu ; il s’est fait son serviteur de cœur et d’âme, s’acquittant désormais de tous les devoirs d’une vertu parfaite, évitant avec scrupule toute parole, toute pensée même, toute occasion capable d’offenser Dieu. Eh bien, vous qui êtes loin d’atteindre à la vertu héroïque de cet homme parfait, vous pouvez cependant espérer une portion de la récompense qui l’attend. Et comment ? Aidez-le par vos paroles et par vos actes ; soutenez-le, en lui donnant le nécessaire, en vous constituant le serviteur attentif de tous ses besoins. Vous méritez dès lors avec lui, parce que, grâce à vous, cette vie rude et méritante lui est devenue plus facile.
Si donc vous admirez les saints habitants du désert, ou ceux qui ont embrassé un genre de vie tout angélique, ou, ceux encore qui, dans l’Église, pratiquent les mêmes vertus ; si vous les admirez, dis-je, et si vous gémissez de vous voir si fort devancés par de nobles exemples, il vous reste un moyen d’entrer en communauté de mérite avec eux : prêtez-leur aide et assistance. C’est, en effet, un trait de la bonté de Dieu qu’il veut bien élever par une autre route à la hauteur des parfaits, ces chrétiens simples et moins zélés, qui n’ont point la force d’embrasser cette vie âpre et rude, mais si glorieuse. Saint Paul leur explique, cette puissance de l’association ; ils nous font, dit-il, une part dans leurs biens de la chair, et nous leur faisons part des biens de l’esprit.
Dieu lui-même, pour nos vertus si misérables et sans aucun prix, veut bien nous donner un royaume ; ses saints, après lui et comme lui, nous donnent les biens spirituels en échange de services bien minces et purement charnels. Ou plutôt, c’est Dieu qui, par ses serviteurs, nous donne et les biens spirituels et les dons de la gloire. Vous ne pouvez supporter le jeûne, la solitude, vous ne pouvez coucher sur la dure, vous ne pouvez passer de longues nuits sans sommeil ? Vous partagerez la récompense due à ces exercices de l’homme parfait, si vous faites de son travail votre propriété même ; si l’athlète est l’objet de vos soins continus, de vos larges aumônes, si vous lui facilitez les saints combats de la perfection. Lui, fait face à l’ennemi, il lutte, il reçoit les coups : et vous, quand il reviendra de la bataille, soignez-le, recevez-le dans vos, bras, essuyez sa sueur, pansez ses plaies, consolez et relevez cette grande âme fatiguée. Servir ainsi les saints avec un zèle empressé, c’est se créer un droit à partager avec eux le salaire éternel. Jésus-Christ lui-même l’enseigne : « Faites-vous des amis avec l’argent d’iniquité, afin qu’ils vous reçoivent dans « les tabernacles éternels ». (Lc. 16,9) – Vous voyez comment les Philippiens ont su