Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en vous et remplisse vos âmes ». Il est encore un autre moyen de témoigner à Dieu notre reconnaissance ; j’en ai déjà parlé. Ce moyen consiste, quand on est malheureux, à passer en revue, à regarder autour de soi ceux qui ont encore plus souffert que nous, et à rendre grâces à Dieu qui ne nous a pas éprouvés comme eux. – « Que la parole du Christ demeure en vous et remplisse vos âmes ». Cette parole du Christ, ce sont ses dogmes, ce sont ses avis, c’est sa doctrine où il nous montre le néant de la vie présente et de ses biens. Si cette vérité devient évidente pour nous, nous ne reculerons devant aucune difficulté. « Qu’elle habite en vous », dit-il, « et qu’elle remplisse vos âmes ». Il ne s’est pas contenté de dire : « Qu’elle habite en vous », il a ajouté : « Qu’elle remplisse vos âmes ». Écoutez tous tant que vous êtes, hommes du monde, vous qui avez une femme, qui avez des enfants. Voyez comme il vous recommande de lire les saintes Écritures et d’apporter à cette lecture non pas un esprit distrait et léger, mais une grande attention, une grande ardeur. Le riche peut supporter l’amende et bien des condamnations ; de même celui qui possède les dogmes de la sagesse peut supporter facilement non seulement la pauvreté, mais les autres malheurs ; il les supportera même plus facilement que le riche ne supportera l’amende. Car le riche, en payant l’amende, éprouve un dommage qui, multiplié, finirait par épuiser ses finances ; mais il n’en est pas ainsi de celui qui est riche en sagesse ; la raison et la droiture ne s’épuisent pas en faisant face aux événements ; elles subsistent toujours.
Et voyez l’intelligence du saint apôtre. Il ne s’est pas borné à dire : Que la parole du Christ soit en vous. Qu’a-t il dit ? Il a dit : « Que la parole du Christ habite en vous et qu’elle remplisse vos âmes. Instruisez-vous en toute sagesse et exhortez-vous les uns les autres ». Pour lui, la vertu c’est la sagesse, et avec raison. La sagesse, en effet, c’est l’humilité, c’est l’aumône avec ses sœurs ; les vices au contraire ne sont que folie. C’est une folie que la dureté du cœur. Aussi, en mille endroits, l’Écriture donne-t-elle au péché le nom de folie. « L’insensé a dit dans son cœur, il n’y a pas de Dieu » ; et ailleurs : « J’ai vu, dans ma folie, mes cicatrices se pourrir et se corrompre ». (Ps. 13,1 ; 37,6) Quoi de plus insensé en effet que cet homme bien vêtu qui voit avec indifférence la nudité de ses frères, qui nourrit une meute de chien et qui, dans son mépris, abandonne aux tourments de la faim un être fait à l’image de Dieu ; qui tout en étant persuadé du néant des choses humaines, y demeure attaché, comme si elles devaient durer toujours ? Si c’est là le comble de la folie, la droiture en revanche est le comble de la sagesse. Voyez en effet comment se comporte le sage : il est charitable, compatissant et bon, il reconnaît que nous sommes tous frères, il connaît le peu de cas que l’on doit faire de la fortune, il sait qu’il faut être plus économe de sa personne que de son argent. Tout homme qui méprise la gloire est donc philosophe, parce qu’il connaît les choses humaines ; car la science des choses divines et humaines, c’est la philosophie. Le philosophe sait donc faire la différence des choses divines et humaines. Il s’abstient de celles-ci, il s’occupe de celles-là ; il sait en toutes choses rendre grâces à Dieu ; il connaît le néant de la vie présente ; voilà pourquoi il ne se laisse ni enivrer par la prospérité, ni abattre par tes revers. Qu’avez-vous besoin de maîtres ? Vous avez la parole de Dieu. Où trouver un meilleur enseignement ? Souvent, par vaine gloire ou par jalousie, un maître vulgaire ne vous transmet qu’une partie de sa science.
Écoutez bien, vous tous qui vous préoccupez des choses de cette vie, et faites provision de ces livres qui contiennent les remèdes de l’âme. Si vous ne voulez pas en avoir beaucoup, procurez-vous du moins le Nouveau Testament, les Actes des apôtres, les Évangiles. Vous y trouverez des leçons bonnes en tout temps. S’il vous arrive un chagrin, ouvrez cette officine, vous y trouverez quelque remède qui adoucira votre douleur. Venez-vous à éprouver une perte d’argent, la mort est-elle à votre porte, perdez-vous quelqu’un des vôtres ? Jetez les yeux sur ces divins formulaires, pénétrez-vous en, retenez-les bien. La source de tous les maux, c’est l’ignorance des saintes Écritures. Les ignorer, c’est marcher sans armes au combat. Comment donc vous défendrez-vous ? Nous devons nous trouver heureux, si ces armes nous sauvent ; si nous ne les avons pas, comment donc pouvons-nous être sauvés ? Ne jetez pas sur nous tout le fardeau. Vous êtes nos brebis ; mais vous êtes des brebis douées de raison. Vous aussi vous avez à remplir