Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/181

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écrit : « Je me souviens de tes larmes, quand je veux goûter une joie sans mélange ». (2Tim. 1,25) Bien souvent aussi, c’est la joie qui fait couler les larmes. Alors c’est un plaisir, c’est un grand plaisir de pleurer. De pareilles larmes ne sont ni, brûlantes ni amères ; elles ne prennent point leur source dans une douleur mondaine ; de pareilles larmes sont autrement précieuses que les larmes arrachées par les plaisirs terrestres. Écoutez cette parole du Prophète : « Le Seigneur a entendu mes pleurs ». (Ps. 6,9) Les larmes sont-elles jamais inutiles ? N’ont-elles pas leur utilité dans les prières, dans les avis ? Nous les blâmons, nous autres, parce que nous ne savons pas nous en servir. Consolons-nous un frère d’une faute qu’il a commise ? pleurons et gémissons. Perdons-nous notre temps à conseiller un sourd qui court à sa perte ? pleurons encore. Ces larmes-là sont celles de la sagesse.
Mais que la pauvreté, la maladie et la mort ne fassent pas couler nos larmes ; car elles ne les méritent pas. Nous blâmons le rire hors de saison ; nous blâmons les larmes répandues mal a propos. La vertu ne se montre dans tout son lustre que lorsqu’elle est bien employée. Le vin a été donné à l’homme pour l’égayer et non pour l’enivrer ; le pain a été donné à l’homme pour le nourrir ; l’union des sexes a été donnée à l’homme pour propager son espèce. L’abus de tous ces dons est blâmable ; l’abus des larmes est blâmable. Posons, en principe, que les larmes ne doivent être employées que dans les prières et dans les admonestations ; dans ces deux cas, il faut appeler les larmes. Rien ne lave mieux les souillures du péché. De plus, elles rehaussent la beauté, en inspirant la compassion ; elles donnent à la physionomie une teinte grave et honnête. Rien de plus sympathique que des yeux en pleurs. L’œil est le plus noble et le plus beau des organes ; c’est l’organe de l’âme. A travers ces yeux en larmes, c’est l’âme que nous voyons pleurer et c’est ce qui cause notre émotion. J’ai un but, en vous tenant ce langage c’est de vous éloigner de ces noces, de ces danses, de ces chœurs où règne une licence qui est l’œuvre du démon. Voyez, en effet, ce que l’esprit du mal a imaginé. La nature elle-même écarte les femmes du théâtre et de ses peintures déshonnêtes ; voilà pourquoi le démon a introduit dans le gynécée des hommes efféminés et des courtisanes. Cet abus a été amené par je ne sais quelle loi nuptiale ; mais pourquoi parler de loi nuptiale ? Il a été amené par notre mollesse. O homme ! pourquoi agir ainsi ? Vous ne savez ce que vous faites. Vous vous mariez parce que vous voulez mener une vie honorable et avoir des enfants. Pourquoi donc ces courtisanes ? Pour égayer les noces, dites-vous. Mais n’est-ce pas une folie ? N’est-ce pas une insulte que vous faites à votre épouse et aux femmes que vous invitez ? Et si elles trouvent du plaisir à cela, c’est un plaisir honteux. Mais, si la vue de ces courtisanes éhontées et sans pudeur est un spectacle si magnifique, pourquoi n’en faites-vous pas jouir votre épouse, pourquoi l’en éloigner ?
Ah ! quelle infamie d’introduire chez vous des danseurs efféminés et toutes les pompes de Satan ! « Souvenez-vous des liens de Paul ». Le mariage aussi est un lien, un lien d’institution divine, tandis que la courtisane est le type de la dissolution. Il est d’autres moyens d’égayer les noces. On fait bonne chère, on fait toilette ; je ne le défends pas, pour ne point avoir l’air d’un sauvage. Pourtant Rébecca, ce jour-là, parut avec ses vêtements de travail. Mais enfin je vous permets ces extra. Mettez vos habits de fête ; livrez-vous à la joie en bonne compagnie. Mais à quoi bon de monstrueux plaisirs ? Quels propos entendez-vous sortir de la bouche de ces bouffons ? Vous rougiriez de les répéter. Quoi ! vous en rougissez et vous les provoquez ? Si vous admirez ces baladins, pourquoi ne faites-vous pas comme eux ? S’ils vous font rougir, pourquoi les forcer à parler comme ils parlent ? Il faut observer en tout les lois de la tempérance, de la modestie, de la dignité et de la décence, et, dans vos têtes, que voit-on ? Des baladins qui sautent comme des chameaux et des mulets. La jeune mariée ne doit connaître que le lit nuptial. Mais elle est pauvre, dites-vous. Eh bien, c’est pour elle une raison d’être modeste et honnête. La vertu doit lui tenir lieu de richesse. Mais elle ne peut apporter de dot. Pourquoi donc voulez-vous la pervertir et la rendre tout à la fois pauvre et méprisable ? Qu’elle ait auprès d’elle d’autres jeunes filles, ses compagnes ; qu’elle ait auprès d’elle de jeunes mariées dont elle va grossir le nombre, à la bonne heure ! et voilà qui est convenable. Il y a là, en effet, deux troupes ; la troupe des jeunes filles, la troupe des jeunes mariées. La