Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/304

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pour un païen, au moment de la célébration des mystères, voyez ce qu’ajoute l’apôtre, et quel avantage il signale afin que son avis soit reçu. « Afin », dit-il, « que nous passions une vie paisible et tranquille ». C’est-à-dire que le salut de ceux-là, c’est pour nous le repos ; c’est ainsi que, dans l’épître aux Romains, les engageant à obéir aux princes, il dit qu’on le doit faire, non seulement par nécessité, mais aussi par conscience. Car c’est pour l’utilité commune que Dieu a établi les puissances. Ne serait-il donc pas déraisonnable qu’ils marchent à la guerre et dressent des armées, afin que nous vivions en sécurité et que nous – ne fassions pas même de prières pour ceux qui s’exposent aux périls et aux fatigues de la guerre ? Ce n’est donc point flatterie, mais justice. Car s’ils n’étaient point préservés dans les périls et n’acquéraient point d’honneur à là guerre, nous serions dans le trouble et les alarmes ; nous serions obligés, s’ils étaient massacrés par l’ennemi, ou de marcher nous-mêmes aux combats, ou de fuir et d’errer en tous lieux. Ils sont pour nous comme des remparts qui gardent en paix les habitants d’une ville. – « Des demandes, des prières, des supplications, des actions de grâces ». Nous devons en effet rendre grâces à Dieu, même pour le bien qui arrive aux autres ; de ce qu’il fait lever le soleil sur les méchants et les bons, et donne la pluie aux justes et aux injustes. Voyez-vous que ce n’est pas seulement par la prière, mais par les actions de grâces qu’il nous unit comme en un seul corps ? Car celui qui est obligé de remercier Dieu du bonheur de son prochain, est obligé de l’aimer, d’être, animé envers lui de sentiments de bienveillance. Et si nous devons rendre grâces pour le bien qui est fait au prochain, combien plus pour celui qui nous est fait, même à notre insu ; pour le bien qui nous est fait avec ou malgré notre volonté, et même pour ce qui nous paraît fâcheux, car Dieu dispose tout pour notre bien.
2. Que toute prière soit donc pour nous, accompagnée d’actions de grâces. Mais s’il nous est ordonné de prier pour notre prochain, non seulement fidèle, mais aussi infidèle, réfléchissez combien il est criminel de prononcer des imprécations contre nos frères. Que direz-vous ? L’apôtre vous a ordonné de prier pour vos ennemis et vous maudissez votre frère. Ce n’est pas lui, c’est vous une vous maudissez, car vous irritez Dieu en prononçant des paroles impies : Faites-lui sentir ceci, faites-lui cela, frappez-le, rendez-lui le mal qu’il me fait. Loin des disciples du Christ de telles paroles : ils sont faciles et doux ; loin d’une bouche qui est jugée digne de recevoir de tels mystères. Qu’elle ne prononce rien d’amer, rien de dur ; la langue sur laquelle vient reposer le corps divin, gardons-la pure, en ne lui faisant point proférer d’imprécations. Car, si les médisants n’hériteront point du royaume de Dieu, combien plus ceux qui maudissent. Celui qui maudit se rend nécessairement coupable d’offenses envers son prochain. Prier l’un pour l’autre et s’en rendre coupable sont choses incompatibles ; l’imprécation et la prière sont séparées par un abîme. Vous priez Dieu d’être miséricordieux envers vous et vous maudissez un autre homme ? Si vous ne pardonnez, il ne vous sera point pardonné ; et non seulement vous ne pardonnez pas, mais vous priez Dieu de ne pas pardonner. Comprenez-vous cet excès de malice ? S’il n’est point pardonné à celui qui ne pardonne pas, comment le serait-il à celui qui supplie le Maître commun de ne pas remettre la dette ? Ce n’est pas à votre ennemi que vous nuisez, mais à vous-même. Non, si Dieu allait vous exaucer priant pour vous-même, vous ne serez point exaucé, parce que vous priez d’une bouche criminelle ; cette bouche est vraiment criminelle et impure, pleine de toute infection et de toute impureté. Vous deviez trembler à cause de vos péchés, et ne faire effort que pour obtenir grâce, et vous venez vers Dieu pour l’exciter contre votre frère ? Ne craignez-vous donc point ? Ne vous inquiétez-vous point pour vous-même ? Ne voyez-vous pas à quelle issue vous arrivez ?
Imitez au moins les enfants qui vont à l’école : lorsqu’on demande à leur division compte de ce qu’elle a appris, et que tous sont châtiés pour leur paresse, qu’ils sont l’un après l’autre examinés sévèrement et accablés de coups, chacun meurt de peur ; et quand un de ses condisciples l’aurait battu cent fois, l’élève n’a pas le loisir de se mettre en colère, mais la crainte l’occupe tout entier ; il ne s’adresse point à son maître, mais n’a qu’une seule chose en vue, c’est d’entrer et de sortir sans être frappé ; c’est là le seul point dont il s’occupe ; quand il est parti, il ne pense même pas, tant il est content, si son camarade l’a