Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/327

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qu’il s’adresse. Oui, nous vivons ici dans d’heureuses espérances. Celui dont la conscience est sans reproche, qui sans cesse agit avec droiture, se sent heureux, même en ce monde ; de même que le méchant est châtié non seulement dans la vie future, mais dans celle-ci, vivant sans cesse dans la crainte, n’osant regarder personne avec aisance, tremblant, pâlissant, tourmenté. N’est-il pas vrai que les hommes cupides et voleurs ne sont jamais rassurés sur ce qu’ils possèdent ? Que les adultères, les meurtriers mènent une vie fort misérable, n’osant lever les yeux sans inquiétude même sur le soleil ? Est-ce là vivre ? Non certes ; c’est une mort douloureuse. « C’est pour cela », dit l’apôtre, « que nous supportons les fatigues et les outrages, parce que nous avons mis notre espérance au Dieu vivant, qui est Sauveur de tous les hommes et surtout des fidèles (40) ». Comme s’il disait Pourquoi nous imposer tant de peines, si nous n’attendons pas les biens futurs ? Pourquoi tous les hommes nous outragent-ils ? Tout ce que nous avons souffert n’est-il pas terrible ? Et avons-nous souffert en vain tant d’injures, d’outrages et de maux de toute sorte ? Si nous n’avons pas mis notre espérance dans le Dieu vivant, pourquoi les avons-nous supportés ? S’il sauve les infidèles en ce monde, combien plus les fidèles dans l’autre ? De quel salut veut-il parler ? De celui de l’autre vie. – « Qui est le Sauveur de tous les hommes et « surtout des fidèles n, ce qui signifie qu’il leur témoigne un soin plus grand. Il a d’abord parlé de cette vie. Et comment, dira-t-on, Dieu est-il le Sauveur des fidèles ? S’il ne l’était pas, il ne les eût pas garantis de leur perte, quand ils sont attaqués de toutes parts. En cette vie il exhorte le fidèle à affronter les dangers, à ne pas se laisser abattre, quand il a un Dieu si bon, à ne pas réclamer une assistance étrangère, mais à tout supporter de bon cœur et avec générosité. Ceux, en effet, qui aspirent aux biens de la vie affrontent les soucis, lorsqu’ils aperçoivent l’espoir d’un gain.
Enfin viendront les derniers temps : « Dans les temps ultérieurs », a dit l’apôtre, « des hommes s’éloigneront de la foi, s’attachant à des esprits d’erreur et aux enseignements des démons, avec l’hypocrisie de ceux qui profèrent des mensonges, qui ont cautérisé leur conscience, prohibent le mariage ». Mais quoi, dira-t-on, ne prohibons-nous pas nous-mêmes le mariage ? Non certes, à Dieu ne plaise, nous ne le défendons pas à ceux qui le désirent, mais ceux qui ne le désirent pas, nous les exhortons à la virginité. Autre chose est prohiber, autre chose est laisser maître de son choix : celui qui impose une prohibition le fait d’une manière absolue ; celui qui exhorte à la virginité comme à quelque chose de plus grand ne prohibe point le mariage ; il s’en tient au conseil. « Prohibent le mariage, enseignent l’abstinence des aliments que Dieu a créés, pour que les fidèles, qui reconnaissent la vérité, en usent avec actions de grâces ». L’apôtre a bien dit : Qui « reconnaissent » la vérité. L’état ancien n’était qu’une figure : il n’y a pas de viande impure par elle-même ; elle ne le devient que par rapport à la conscience de celui qui en use. Pourquoi Dieu a-t-il interdit aux Juifs tant d’aliments ? Pour réprimer leur grande sensualité. S’il leur eût dit : Ne faites pas de repas sensuels, ils ne se fussent abstenus de rien ; il a donc renfermé cette règle sous l’obligation de la loi, afin de les contenir par une crainte plus grande. Il est évident que le poisson est plus impur que le porc ; cependant Dieu ne l’a pas interdit. Pour savoir combien ils étaient en proie à la sensualité, écoutez ce que dit Moïse « Le bien-aimé a mangé, il s’est engraissé, il s’est épaissi, il a regimbé ». (Deut. 32,15) Il y a aussi une autre cause. Dieu défendait aux Juifs, qui allaient vivre dans un pays resserré, d’user des autres animaux, afin qu’ils fussent contraints de se nourrir de bœufs et d’égorger des brebis, prescription sage à cause d’Apis et du veau ; car Apis était impur, odieux à Dieu, souillé, profane.
3. Mettez ces objets sous vos yeux, méditez-les ; car c’est ce que l’apôtre fait entendre par ces mots : « Nourri des paroles de la foi ». Ne vous bornez pas à exhorter les autres, mais méditez-les vous-même. « Nourri des paroles de la foi et de la bonne doctrine que vous avez suivie. Éloignez-vous des fables profanes et dignes de vieilles femmes ». Pourquoi Paul n’a-t-il pas dit : Abstenez-vous, mais : Éloignez-vous ? Ne descendez point à disputer contre ces hommes, mais exhortez ceux qui vous sont confiés à repousser ces doctrines. Car on ne saurait rien gagner à lutter ainsi contre ceux qui se sont détournés de la voie de Dieu, sauf le cas où nous penserions qu’il y eût scandale, parce que nous paraîtrions