Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/404

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serai plus, rejaillira sur vous. Le roi lui-même m’a souvent témoigné me savoir gré des services que je lui ai rendus ; j’ai remporté des victoires ; j’ai mis les ennemis en fuite. Un père qui parlerait de la sorte, ne le ferait point par vanité, mais pour relever le courage de son fils et l’aider à supporter doucement sa mort. Car on ne peut nier que les séparations ne soient pénibles.

Écoutez de quelle manière saint Paul en parle dans son épître aux Thessaloniciens : « J’ai été quelque temps, séparé de vous de corps, non de cœur ». (1Th. 2,17) Si saint Paul souffrait à ce point quand il était séparé de ses disciples, que croyez-vous que devait éprouver Timothée, sur le point de perdre pour toujours un tel maître ? Si ce disciple, pour s’être seulement séparé d’avec saint Paul, de son vivant, répandait tant de larmes que saint Paul dit lui-même (2Ti. 1,4) qu’il ne perdait point le souvenir de ces larmes, et que ce souvenir le remplissait de joie, combien en devait-il verser davantage à sa mort ? C’est donc pour le consoler que saint Paul lui écrit ces choses, et toute cette épître est remplie de consolations et forme comme un testament.

« J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi » ; combattez bien aussi à mon exemple. Mais est-ce un combat que l’on puisse appeler bon que d’être dans les prisons, dans les chaînés, dans les persécutions ? Oui, c’est bien combattre que d’être dans ces souffrances pour Jésus-Christ, et elles seront enfin couronnées. Il n’y a pas de combat comparable à celui-là. La couronne que l’on y acquiert ne se flétrit point. Elle n’est point composée de feuilles d’oliviers ; ce n’est pas un homme qui nous la pose sur la tête, ce n’est pas non plus dans une assemblée d’hommes qu’elle nous est décernée, c’est dans un théâtre tout composé d’anges. Dans les combats de la terre, on lutte, on se fatigue durant plusieurs jours ; et de longs travaux sont récompensés d’une couronne qui se flétrit en moins d’une heure ; et avec son éclat qui s’obscurcit, s’envole en même temps, le plaisir qu’elle nous cause. Il n’en est pas de même ici ; mais la couronne que l’on reçoit est éternellement brillante, honorable, glorieuse. Réjouissez-vous donc, dit saint Paul à son disciple, car j’entre dans le repos éternel, je sors pour toujours de l’arène des combats. Je l’ai déjà dit, il vaut mieux pour moi mourir et être avec Jésus-Christ. (Phi. 1, 23) « J’ai achevé ma course ». Il faut donc combattre et courir : combattre en endurant les afflictions, courir non pas en vain, mais en tendant à un but utile. Il est vraiment bon le combat qui n’est pas seulement agréable mais utile au spectateur. C’est aussi une bonne course que celle qui au lieu de ne mener à rien, au lieu de n’être qu’un moyen de montrer sa force et d’acquérir une inutile gloire, élève jusqu’au ciel ceux qui courent. Cette course de saint Paul sur la terre était plus glorieuse et éclairait plus le monde que celle que le soleil accomplit dans le ciel. Mais de quelle manière saint Paul a-t-il achevé sa course ? Il a parcouru la terre en commençant depuis la Galilée et l’Arabie, et allant de là jusqu’aux extrémités du monde. « J’ai », dit-il lui-même dans son épître aux Romains, « rempli de l’Évangile de Jésus-Christ tous les pays qui sont entre Jérusalem et l’Illyrie » ; (Rom. 15,19) Il parcourait toute la terre avec la vitesse de l’aigle, ou même avec un vol plus rapide et plus merveilleux encore. Car porté sur les ailes de l’Esprit-Saint il passait au travers de mille obstacles, de mille morts, de mille pièges, de mille afflictions. Si son vol n’eût été que celui de l’aigle, il eût pu être abattu et pris ; mais soulevé par l’Esprit-Saint il passait par-dessus tous les filets ; son vol était celui d’un aigle aux ailes de feu.

« J’ai gardé la foi ». Et cependant combien de choses pouvaient la lui ravir ! Les amitiés des hommes, leurs menaces de mort et leurs mauvais traitements. Mais il avait résisté à tout. Par quel moyen ? Par la sobriété et la vigilance. Cela pouvait suffire pour consoler ses disciples, mais saint Paul veut bien encore y ajouter les récompenses qu’il attend. – « Il ne me reste qu’à attendre la couronne de justice qui m’est réservée, etc ». Ici, par le mot de « justice », il entend toute la vertu. Qu’on ne s’afflige donc point, puisque je m’en vais pour recevoir une couronne que Jésus-Christ lui-même posera sur ma tête. Si je restais en ce monde, c’est alors qu’il conviendrait bien plutôt de pleurer et d’appréhender ma chute et ma perte. – « Couronne que me donnera en ce jour le Seigneur, ce juste juge, et non seulement à moi, mais à tous ceux qui aiment son avènement ». Ceci encore est fait pour donner de la confiance a Timothée. Cette couronne