Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/584

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a tant de beauté, quel sera l’Époux lui-même ? Mais pourquoi vous ai-je dit de déposer ces ornements d’or pour les donner aux pauvres ? Fallut-il, ô femmes, vous vendre vous-mêmes, fallut-il descendre avec vos enfants jusqu’à la servitude, afin de pouvoir être avec cet Époux, pour jouir de toute sa beauté, pour contempler à jamais ses traits, ne devriez-vous pas gaiement et de grand cœur tout accepter ? Pour voir un roi de la terre, souvent nous laissons échapper de nos mains un objet même nécessaire ; mais pour contempler ce R. votre Époux, combien plus volontiers il faudrait tout subir ! Les biens de ce monde, en effet, ne sont que des ombres : là seulement est la vérité ! Oui, pour voir dans les cieux ce Roi, cet Époux ; et surtout pour le bonheur de marcher devant lui, lampe en main, d’habiter près de lui, de résider à tout jamais avec lui, que ne faut-il pas faire ; que ne faut-il pas produire ; que ne faut-il pas supporter ?
Ah ! concevons, je vous en supplie, quelque désir vrai de ces biens célestes : désirons cet Époux immortel. Soyons vierges de la virginité véritable : car Dieu exige la virginité de l’âme. Avec elle entrons aux cieux ; mais sans avoir ni tache, ni ride, ni défaut d’aucune sorte, qui nous empêcherait de gagner les biens promis. Puissions-nous y arriver tous, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ !

HOMÉLIE XXIX.


VOUS N’AVEZ PAS ENCORE RÉSISTÉ JUSQU’AU SANG, EN COMBATTANT CONTRE LE PÉCHÉ. (CHAP. 12, DU VERSET 4 AU VERSET 11)

Analyse.

  • 1 et 2. Deux consolations, contradictoires en apparence, et qui se complètent l’une par l’autre. – Les épreuves et les adversités ne sont point une marque d’abandon de Dieu : bien au contraire, elles nous apprennent qu’il est notre vrai Père, et que nous sommes ses véritables enfants. – Dieu nous aime mieux que nos pères mêmes, quand il nous châtie. – Il n’agit point par caprice ni pour son intérêt, mais uniquement pour notre bien.
  • 3 et 4. Tous les saints de l’Ancien et du Nouveau Testament ont accepté de bon cœur les souffrances de la vie ; tous les pécheurs ont passé par les délices, qui ont causé leur perte dans le temps et dans l’éternité. – Les mœurs de nos jours sont, malheureusement, celles de Babylone et de Sodome. – Les hommes s’efféminent par le luxe des vêtements et par la bonne chère ; les femmes y perdent leur force et leur beauté, l’âme se pourrit dans ce corps qui s’énerve.


1. Deux manières de consoler, bien contradictoires en apparence, donnent au cœur une force merveilleuse, quand on les présente ensemble aussi saint Paul les emploie-t-il l’une et l’autre. L’une a lieu, quand nous disons à une âme navrée, que plusieurs avant elle ont beaucoup plus souffert ; à cette pensée, l’âme attristée se calme, parce qu’elle aperçoit de nombreux témoins de ses combats ; c’est ce moyen qu’employait précédemment saint Paul, lorsqu’il rappelait aux Hébreux leurs propres exemples : « Souvenez-vous, disait-il, de ces anciens jours, où récemment appelés à la lumière, vous avez soutenu de grands combats au milieu de diverses souffrances ». (Héb. 10,32) L’autre consolation parle un langage tout opposé ; vous n’avez pas, dit-elle, souffert un mal bien grand ! Une observation pareille change le cours de vos idées, vous réveille, vous rend plus empressés à souffrir encore. Le premier genre de consolation était un calmant, un topique sur votre âme blessée ; le second est un excitant qui ranime une âme affaiblie, relâchée, qui remue un cœur engourdi et terrassé déjà, et le tire d’une première et fâcheuse indécision. Et comme, d’ailleurs, le premier témoignage qu’il leur a rendu pourrait leur donner quelque orgueil, il croit à propos de leur dire cette seconde parole : « Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang, en combattant contre le péché, et vous avez oublié la consolation… » Et, sans poursuivre alors le fil de son discours, il leur a montré d’abord tous ces héros qui ont résisté jusqu’à l’effusion de leur sang ; il a ensuite ajouté que les souffrances de Jésus-Christ font notre gloire et la sienne ; et après ces préliminaires, il a pu librement continuer sa course et son exhortation entraînante.
C’est dans le même sens qu’il écrivait aux Corinthiens : « Puissiez-vous n’être attaqués que par une tentation humaine » (1Cor. 10,13), c’est-à-dire petite et supportable. Car pour relever, pour redresser une âme, il suffit de lui inspirer la pensée qu’elle n’a pas encore gravi les plus hauts sommets de la vertu, et de l’en convaincre par les épreuves mêmes qu’elle a traversées déjà. Et voici bien, en effet, ce que dit l’apôtre : Vous n’avez pas encore subi la mort ; vous n’avez souffert que jusque dans vos biens et dans votre gloire, que jusqu’à l’exil. Jésus-Christ a pour nous répandu son sang ; vous ne l’avez pas même versé pour votre propre compte. Il a combattu, lui, jusqu’à la mort, pour la vérité, et dans votre seul intérêt ; et vous n’avez pas encore affronté, vous, des périls où la vie soit en jeu.
« Et vous avez oublié la consolation »… ; c’est-à-dire, vous avez laissé tomber vos bras découragés, vous avez été brisés, bien que vous n’eussiez pas encore, ajoute-t-il, résisté jusqu’au sang dans ces combats contre le péché. Cette parole nous montre