Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/96

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encore de Dieu. Les endormis ne sont pas même honorés par leurs parents : le seraient-ils de Dieu ? Travaillons un instant, pour nous reposer durant toute l’éternité. Il nous faut absolument souffrir ; si la souffrance nous épargne ici-bas, elle nous attend dans l’autre vie. Pourquoi ne pas préférer la peine en ce monde, pour trouver ailleurs le repos sans fin ? Ah ! plaise à Dieu que menant enfin une vie digne de Jésus-Christ, et devenus conformes à sa mort, nous puissions gagner les biens qu’aucun langage ne peut peindre, en Jésus-Christ Notre-Seigneur, avec lequel soit au Père et au Saint-Esprit, etc.

HOMÉLIE XIV.

RÉJOUISSEZ-VOUS SANS CESSE DANS LE SEIGNEUR ; JE LE DIS ENCORE UNE FOIS, RÉJOUISSEZ-VOUS. (IV, 4 JUSQU’À 10)

Analyse.

  • 1. L’orateur développe simplement le texte de l’apôtre, et ses consolations et recommandations aux Philippiens. — Première consolation : joie intime, jusque dans les souffrances et le pardon des injures.
  • 2. Seconde consolation : la prière, l’action de grâces, sources d’une paix qui surpasse tout sentiment. — Troisième consolation : une sainte émulation pour tout ce qui est bon, beau, vrai, pur, honnête : la paix encore est à ce prix.
  • 3. Le vice, et surtout le vice impur, porte avec lui sa peine. — La vertu apporte avec elle-même sa récompense, ce qui est vrai surtout du pardon des injures.

1. Jésus-Christ a déclaré bienheureux ceux qui pleurent, malheureux ceux qui rient. Quel est donc le sens de ces paroles de son apôtre : « Réjouissez-vous sans cesse dans le Seigneur ? » Il ne contredit point son maître, oh non ! Jésus-Christ, en effet, annonce malheur à ceux qui rient de ce rire mondain qui a sa raison dans les choses du temps, et il proclame bienheureux ceux qui pleurent, mais non pas ceux qui le font pour quelque raison humaine, comme la perte d’un bien temporel, mais ceux qui ont la componction chrétienne, pleurant leurs misères, expiant leurs péchés et même ceux d’autrui. La joie recommandée ici, loin d’être contraire à ces larmes, s’engendre à leur source pure et féconde. Pleurer ses véritables misères, et les confesser, c’est se créer une joie et un bonheur. D’ailleurs il est bien permis de gémir sur ses péchés et de se réjouir en l’honneur de Jésus-Christ. Les Philippiens souffraient de rudes épreuves, comme le rappelle l’apôtre : « Il vous a été donné », leur disait-il, « non seulement de croire en Jésus-Christ, mais de souffrir pour lui » (Phil. 1,29) ; pour cette raison, il ajoute : « Réjouissez-vous dans le Seigneur ». C’est dire en d’autres termes : Vivez de manière à goûter une joie pure. Tant que rien n’empêchera vos progrès dans le service de Dieu, réjouissez-vous en lui. C’est là le sens, à moins que cette préposition « en » ne soit synonyme de « avec » ; le sens alors serait : Réjouissez-vous sans cesse d’être « avec le Seigneur ».

« Je vous le dis encore une fois, réjouissez-vous ». Expression qui prouve la confiance de saint Paul, et par laquelle il montre que, tant qu’on s’appuie sur Dieu, on doit sans cesse être dans la joie ; fût-on d’ailleurs accablé, frappé de toute manière, on la possède toujours. Écoutez, en effet, saint Luc nous raconter au sujet des apôtres « qu’ils sortaient du conseil des juifs en se réjouissant d’avoir été trouvés dignes de recevoir pour son nom la flagellation ». (Act. 5,41) Si les coups et les fers, que chacun regarde comme ce qu’il y a de plus affreux, engendrent une telle joie, quelle autre douleur au monde pourra enfin nous créer la peine ? — « Je vous le répète, réjouissez-vous ». L’apôtre a eu raison de réitérer cette recommandation ; la nature des événements commandait la douleur ; mais cette répétition de termes encourageants leur impose le devoir de se réjouir en dépit des événements.

« Que votre modestie et modération soit connue de tous les hommes ». Paul avait parlé un peu auparavant de ceux « qui ont pour Dieu leur ventre, dont la gloire est dans leur honte même, qui n’ont de goût