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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/32

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vers les désirs spirituels, invoquer Dieu avec une grande ardeur, allumer en nous une tendresse plus vive, et chanter notre réponse d’aujourd’hui non seulement en paroles, mais par nos actions elles-mêmes. En effet, lorsque le bienheureux roi, ou plutôt la grâce du Saint-Esprit, a chanté pour nous les psaumes, ce n’était pas seulement pour nous erg faire prononcer les paroles, c’était aussi pour que nos actions mêmes en reproduisissent les leçons. Quand vous entrez ici, ce n’est pas seulement, croyez-le bien, pour dire les paroles des psaumes, c’est afin que, lors du chant de vos répons, vous considériez comme un contrat ce que vous répondez. Lorsque vous avez dit : « De même que le cerf aspire après les sources, « ainsi mon âme soupire après vous, mon « Dieu ; » vous avez fait un pacte avec Dieu, vous avez, quoique sans papier ni encre, signé une obligation, vous avez confessé verbalement que vous l’aimez par-dessus tout, que vous ne lui préférez rien, et que vous brûlez d’amour pour lui. Si donc en sortant d’ici vous rencontrez une beauté aux mœurs impures qui cherche à vous séduire et, s’attirer votre amour, dites-lui : Je ne puis vous suivre, j’ai fait un contrat avec Dieu, en présence de mes frères, des prêtres, des docteurs ; par les paroles que j’ai répétées en chantant, j’ai confessé que je l’aimais, j’ai promis de l’aimer « de même que le cerf aspire après les sources. » Je redouterais d’enfreindre ce contrat, je me consacre désormais à mon amour pour Dieu. Si vous apercevez de l’argent sur la place, ou des habillements brochés d’or, ou des gens marchant d’un air fier, avec des serviteurs et des chevaux richement caparaçonnés, que cet appareil n’influe en rien sur vous, mais reprenez en vous-même le même chant de psaume, et dites à votre âme : Nous chantions il n’y a qu’un instant : « De même que le cerf aspire après les sources, ainsi mon âme soupire après vous, mon Dieu ; » et nous nous sommes approprié ce texte, nous l’avons rendu nôtre. N’aimons donc rien de ces choses d’ici-bas, afin que cet amour demeure en, nous sans mélange, et qu’il ne s’affaiblisse pas par cette division. Cette richesse pourra nous procurer toute richesse, tous les trésors possibles, toute célébrité, toute gloire, tout éclat. Conservons-la bien, et nous n’aurons besoin de rien autre chose. En effet, quand on voit ces hommes que possède un amour honteux, et qui sont épris de quelque belle courtisane, ne faire attention ni aux menaces d’un père, ni aux reproches de leurs amis, ni au blâme de bien d’autres personnes, mais avoir continuellement cette femme pour but, et dédaigner famille, héritage paternel, gloire, considération, exhortations de l’amitié, croyant avoir une ample compensation de tout cela, s’ils sont considérés de l’objet seul de leur amour, cette femme fût-elle de rang infime, sans honneur, la première venue ; et comment donc ceux qui aiment Dieu comme il faut, seraient-ils sensibles aux choses humaines, soit brillantes, soit fâcheuses ? Non, ils ne verront même pas les illusions de la vie présente, tournés qu’ils sont vers l’amour de Dieu, mais ils riront de toutes les prospérités, et mépriseront tous les revers, captivés par leurs saintes aspirations, et ne voyant que Dieu seul, en tous lieux se le représentant, et se trouvant les plus heureux des hommes. Jusque dans la pauvreté, dans l’ignominie, dans les fers, dans les tribulations, dans les derniers des maux, ils jugeront encore leur position meilleure que celle des souverains mêmes, car ils auront dans toutes leurs souffrances une consolation merveilleuse, celle de souffrir pour l’objet de leurs désirs.
6. Aussi saint Paul, qui était chaque jour voisin de la mort, dans les prisons, au milieu des naufrages, dans les déserts, sous les coups de fouet, victime de mille autres supplices, était joyeux et dans l’allégresse, il tressaillait de plaisir et de ravissement (2Cor. 11,23, 27) ; et tantôt il disait : « Ce n’est pas seulement dans l’espérance de la gloire de Dieu, c’est même de nos tribulations que nous sommes fiers (Rom. 5,2-3) ; » et tantôt : « Je me réjouis dans mes souffrances, et je complète en ma chair ce qui manquait aux afflictions de Jésus-Christ (Col. 1,24) ; » et il appelle cela une grâce ; car voici ce qu’il déclare, ce qu’il dit en propres termes : « C’est ainsi que le Christ nous a fait la grâce, non seulement de croire en lui, mais encore de souffrir pour lui. » (Phil. 1,29) Efforçons-nous donc aussi de penser de la sorte, et souffrons avec joie tout ce qui nous arrive de fâcheux. Nous pourrons le souffrir ainsi, si nous aimons Dieu comme le Prophète l’a aimé. Car ce n’est pas seulement ce verset que les fidèles répondent ensemble qui nous tait voir sa tendresse, ce sont encore les paroles qui suivent. Après avoir dit : « De même que le cerf aspire après les