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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/365

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des termes plus clairs encore. « Le concitoyen n’enseignera plus son concitoyen, ni le frère son frère, en disant : Apprends à connaître le Seigneur, parce que tous me connaîtront depuis le plus  petit jusqu’au plus grand. » Pour les Juifs les éléments changeaient leur nature ; c’étaient des menaces continuelles, des châtiments qui se répétaient sans cesse, des prodiges fréquents, des prophètes qui avertissaient, la crainte du législateur, des guerres imminentes, les incursions de barbares, la colère de Dieu qui se manifestait, des fléaux envoyés par le ciel ; et ils n’en demeuraient pas moins durs de tête et incirconcis de cœur, comme dit saint Étienne, obstinés et entêtés, tandis que pour les nations il suffit d’un mot, d’une parole et toutes accourent à l’Église. C’est ce qu’indique David par ces paroles : « Le peuple que je ne connaissais pas s’est fait mon serviteur » (Ps. 17,45). Et admirant son obéissance, il ajoute : « A peine m’eut-il entendu qu’il m’obéit. » Jacob indique aussi la même chose sous cette figure : « Il liera à la vigne son ânon, et au sarment le petit de son ânesse. » Qui a jamais lié à un sarment, et attaché à une vigne un ânon qui n’endommageât pas le fruit ? Chez les bêtes cela n’arrive pas, mais chez les hommes cela se fait souvent. Les Juifs, que mille chaînes assujettissaient, secouèrent le joug, brisèrent le lien, comme dit le Prophète ; mais les nations qui ne connaissaient point cette nécessité écoutèrent avec docilité, comme un ânon lié au sarment, sans que les préceptes leur parussent à charge ; loin de là, elles se tenaient près de la vigne et montraient une admirable docilité. « Beaucoup de peuples viendront et diront : Allons, montons à la montagne du Seigneur, à la maison du Dieu de Jacob (3). » Voyez-les se livrant à leurs fêtes, tenant leurs assemblées, s’excitant les uns les autres et devenant tous les docteurs les uns des autres ; voyez non pas un, ni deux, ni trois, mais un grand nombre accourant ensemble. Car, dit-il, il viendra beaucoup de peuples et de pays différents, ce qui n’est nullement arrivé pour les Juifs ; si quelques-uns sont venus, ce n’était qu’un petit nombre de prosélytes, obtenus  avec de grandes difficultés ; ce n’étaient pas les nations qui étaient appelées, mais les prosélytes : « Des prosélytes viendront à toi et seront tes serviteurs. » (Is. 54,15) Si le Prophète continue la même métaphore et appelle montagne la maison du Dieu de. ne vous en étonnez pas. Car, comme je l’ai dit, il rend sa prophétie tantôt plus claire tantôt plus obscure ; plus obscure, pour donner aux plus intelligents le moyen de comprendre ce que l’on dit ; plus claire, pour réprimer le mécontentement et les troubles que voudraient exciter les ingrats ; c’est ainsi que partout il varie son langage.
4. Ne vous étonnez pas, mon cher frère, de ce qu’il a dit « Dieu de Jacob ; » car le Fils unique de Dieu était Dieu de Jacob. C’est lui qui a donné la loi et qui a fait tous les miracles que virent les descendants de Jacob ; c’est ce qu’il est facile de voir dans l’Ancien Testament : car pour le Nouveau les Juifs n’en tiennent aucun compte. Jérémie le dit : « Je ferai avec eux une nouvelle alliance, mais non selon l’alliance que je fis avec leurs pères (Jer. 31,31-32) », montrant par là qu’il était l’auteur de l’une comme de l’autre loi. Il ajoute qu’il les a délivrés de la servitude d’Égypte : « Au jour où je les ai pris par la main pour les faire sortir de la terre d’Égypte. » Si c’est lui qui les a fait sortir de l’Égypte, c’est encore lui qui a opéré tant de merveilles et dans l’Égypte et dans le désert. – « Il nous fera connaître sa voie et nous y marcherons. » Voyez-vous comme ils demandent une autre loi ? Car la sainte Écriture appelle ordinairement voie les commandements de Dieu ; s’il avait voulu parler de l’Ancien Testament, il n’aurait pas dit : « Il nous fera connaître ; » car cette loi ancienne, tous la connaissaient manifestement, pleinement.
Ce ne sont pas là des sophismes, mais bien des preuves solides, faites pour convaincre même les plus obstinés. Non content de mentionner seulement cette voie nouvelle, il dit encore de quelle voie il veut parler et indique bien des signes qui la distinguent. Car il poursuit en ces termes : « La loi viendra de Sion et la parole du Seigneur de Jérusalem. » A cela les juifs les plus impudents ne sauraient que répondre. En effet, que ces paroles aient été dites du Nouveau Testament ; c’est ce qu’indiquent avec évidence et le lieu et le temps et la condition de ceux qui reçurent la loi et les événements. qui la suivirent. Et d’abord le lieu, la montagne de Sion. La loi de Moïse a été donnée aux ancêtres des Juifs sur le Sinaï. Comment ici peut-il donc dire « de Sion ? » Et