qu’ils ont été punis, c’est parce qu’ils ont souffert les derniers châtiments. Saint Paul tient souvent ce langage, et d’autres prophètes aussi. Et ces derniers parlaient de la sorte, quoique ne sachant encore rien de l’enfer, ni du royaume du ciel, sans avoir été instruits à voir tout cela d’une âme élevée, et ils supportaient tout avec résignation : « Car notre âme a été abaissée dans la poussière ; notre ventre a été appliqué contre terre (25). » En effet, comme il a dit : « Vous oubliez notre dénuement », ce qui signifie notre affliction ; il insiste ensuite sur cette affliction. Et voici à quoi revient ce qu’il en dit : nous sommes perdus, nous sommes enfouis, notre état n’est en rien meilleur que celui des morts. Et l’on peut bien dire avec raison de ceux qui sont attachés aux choses de ce monde, que leur âme est abaissée dans la poussière, et de ceux qui sont esclaves de leur ventre, que leur ventre est appliqué contre terre.
En effet, celui qui est enchaîné par l’amour, qui est en admiration devant de la boue, et qui asservit a cette cendre la faculté incorporelle qui existe en lui, cet homme, on peut le dire à juste titre, est dans l’état dont nous parlons. Qu’est en effet la beauté du corps, sinon de la poussière, de la boue, ou plutôt, quelque chose de plus hideux encore ? Si vous ne me croyez pas, allez fouiller les sépultures humaines, et vous verrez cette boue et cette poussière. Car une fois que l’enveloppe corporelle est destituée de la vie présente, alors cette enveloppe apparaît ce qu’elle est : que dis-je ? cela lui arrive même avant la mort. En effet, quand la vieillesse sera venue, ou que la maladie l’aura frappée, vous verrez alors quelle sera son apparence ; car elle n’est que boue ; seulement Dieu, en sage créateur, a fait sortir d’une matière si vile une beauté inexprimable, et cela, non pour vous porter à la fornication, mais afin de vous offrir une preuve de sa sagesse. N’outragez donc pas l’artisan, en faisant de l’œuvre de sa sagesse, l’objet de votre impureté et de votre débauche. Que votre admiration pour la beauté n’aille que jusqu’à rendre gloire à l’artisan ; ne la poussez pas plus avant, vous exciteriez la passion. L’ouvrage est beau : il faut donc adorer l’ouvrier, et non pas lui faire outrage. Si un homme, dites-moi, allait s’emparer de la statue en or de quelqu’un, de l’image de quelque prince, et la souillait de bourbe et d’autres immondices, n’en serait-il pas puni avec la dernière rigueur ? Et si une telle irrévérence à l’égard des hommes mérite un si grand châtiment, que devra subir celui qui déshonore de même l’œuvre de Dieu, et surtout lorsqu’ayant une femme il mènera une pareille conduite ? Car ne me parlez pas des désirs de la nature. Le mariage a été accordé aux hommes, pour les empêcher de franchir les limites de la société conjugale. Considérez quel châtiment vous mériteriez. Dieu a pourvu à votre repos et à votre honneur, en sorte que vous puissiez satisfaire cette rage de la nature au moyen de votre femme,.et le faire sans danger, à l’abri de toute ignominie. Et vous allez, de gaîté de cœur, outrager celui qui est pour vous si prévoyant ? Car dites-moi, s’il n’eût pas voulu instituer le mariage, quels tourments, quels supplices n’auriez-vous pas eu à endurer ? Ainsi, vous devez remercier et glorifier Dieu de vous avoir retranché la majeure partie de vos peines, en imaginant un adoucissement admirable ; et au lieu de cela, vous l’outragez avec ingratitude, avec impudence, vous transgressez les limites qu’il a posées, et vous avilissez votre propre honneur. N’entendez-vous pas saint Paul vous disant dans ce moment même, et criant au milieu de tous : « Fuyez la fornication ? » (1Cor. 6,18) Que dis-je ? N’entendez-vous pas Jésus-Christ inspirant l’âme de l’apôtre ? Pourquoi étudiez-vous une beauté étrangère ? pourquoi scruter ce visage qui ne vous appartient pas ? pourquoi courir au travers des précipices ? pourquoi vous jeter dans les filets ? Mettez un rempart à vas yeux, une fortification à vos regards, imposez une loi à votre vue. Écoutez Jésus-Christ qui vous menace, et qui juge vos regards déréglés à l’égal de l’adultère. » (Mt. 5,28) De quelle utilité est le plaisir, lorsqu’il engendre un ver rongeur, une crainte perpétuelle ? lorsqu’il devient pour celui qui en a joui la source d’un châtiment éternel ? Combien ne vaut-il pas mieux, après avoir, pendant un temps bien court supporté ta violence de nos propres pensées, être pour toujours dans le calme, plutôt qu’après avoir fait des concessions, bien courtes aussi, à nos désirs insensés, en être éternellement puni ? « Non, mes enfants, ne faites pas ainsi : les choses que j’entends dire de vous ne sont pas bonnes. » (1Sa. 2,24) Je sais bien quels sont ceux à qui ce discours s’adresse, il ne s’adresse pas à tous ; mais là où il trouve
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