l’homme mais inspirées par la divinité il emploie : le mot de Renvoi pour exprimer cela. C’est là en effet un accident involontaire, à la différence de la parole humaine qu’on profère, qu’on articule, ou qu’on revient à sa fantaisie. Voulant donc montrer que les paroles dont il s’agit ne proviennent point d’un effort humain, usais de l’ébranlement produit par l’inspiration divine, il applique ce mot de Renvoi à la prophétie. Si l’odeur exhalée par notre bouche participe à la qualité des aliments que nous avons mangés, on peut en dire autant de l’enseignement spirituel. Telle nourriture, telle odeur. Voyez comment un antre prophète exprime par une image sensible cette opération ultérieure il mange un livre, et il le mange avec délices « Et il fut dans ma bouche », dit-il,« comme un miel agréable. » Ainsi, ceux qui recevaient la grâce de l’Esprit, en exhalaient l’odeur. Il ne s’agit pas ici de ce renvoi que produisent les aliments, ni de rien de sensible. Écoutez plutôt de quel genre est l’odeur, et d’où elle sort. Ce n’est pas de l’estomac, qui reçoit les aliments, c’est du cœur. « Mon cœur a eu un renvoi. » Et l’odeur qui en sort, quelle est-elle ? ni celle d’un mets, ni celle d’un breuvage, mais celle que peut laisser un pareil festin, à savoir une bonne parole, une parole au sujet du Fils unique, de ce qu’il y a de meilleur ; n’a-t-il pas dit en effet : « Je suis venu non pour juger le monde, mais pour sauver le monde ? » (Jn. 12,47) Tout ici respire la douceur, la clémence, mais pareille odeur ne peut sortir que d’un cœur à l’avance purifié. Ainsi qu’un estomac chargé de sucs immondes exhale une odeur analogue, tandis qu’un estomac sain rend une odeur correspondante à son état : ainsi le cœur du prophète, une fois délivré de ses péchés, reçut la grâce de l’Esprit, et en révéla la présence par une bonne parole. Par là nous pouvons apprendre encore une chose, c’est que les prophètes n’étaient point comme les devins. Chez les devins le démon, du moment où il a pénétré dans l’âme, aveugle la pensée, troublé la raison : et c’est sous cette influence qu’ils prédisent l’avenir à l’insu de leur propre intelligence, à la manière d’un instrument inanimé qui rend des sons. C’est ce qu’un philosophe païen exprime en ces termes : « De même que les diseurs d’oracles et les devins inspirés disent beaucoup de choses sans rien comprendre à ce qu’ils disent[1]. » Ce n’est pas ainsi qu’agit l’Esprit-Saint ; il permet au cœur de connaître les paroles proférées par la bouche. Sinon, comment le Prophète aurait-il pu dire : « Une bonne parole ? » Le démon, comme un ennemi armé en guerre, livre combat à la nature humaine. L’Esprit-Saint, au contraire, dans sa bienfaisance et sa sollicitude, communique sa pensée à ceux qui le reçoivent, et leur permet d’avoir conscience de ses révélations. « Je dis mes ouvrages au Roi : ».suivant un autre, « Mes œuvres. » De quels ouvrages s’agit-il ? De la prophétie. De même que c’est l’ouvrage d’un forgeron de fabriquer des cognées, l’ouvrage d’un architecte de bâtir, l’ouvrage d’un constructeur de vaisseaux de façonner des charpentes de navire : de même c’est l’ouvrage d’un prophète de prophétiser. C’est bien un ouvrage en effet : écoutez plutôt ce que le Christ dit des apôtres : « L’artisan mérite son salaire. » (Lc. 10,7) Et Paul « Surtout ceux qui travaillent à la parole et à la doctrine. » (1Tim. 5,17) Si ce n’était pas un ouvrage, comment serait-il question de travail ? Et quel ouvrage est plus honorable ou plus utile que celui-là ? Point d’industrie qui ne lui soit inférieure. Eh bien ! quel est donc cet ouvrage, qu’il dit au Roi ? Entendez cet hymne, cette prophétie. Il ne dit pas quel est ce Roi : Par là il montre qu’il s’agit du Dieu de l’univers. Quand nous voulons parler du roi des Perses, nous ne disons pas simplement le roi, mais bien le roi des Perses ; et de même pour le roi des Arméniens : mais quand nous parlons du monarque qui nous gouverne, ce nom seul nous suffit pour le désigner. De même le Prophète, voulant parler du roi véritable se contente de dire : « Le Roi. » Ainsi qu’en disant le Tout-Puissant nous disons assez pour nous faire entendre, vu qu’il n’y a pas deux Tout-Puissants : de même il suffit ici de dire le R. parce qu’il n’y a pas d’autre roi qui soit Dieu. Aussi bien celui qui parlait était-il roi lui-même. D’où il résulte qu’il ne veut point parler en cet endroit d’un homme, ruais bien du Dieu de l’univers. Voilà pourquoi il ne dit pas aux rois, mais au roi ; l’adjonction de l’article fait voir de quelle souveraineté il s’agit.
2. Après cela, voulant montrer encore que ces paroles ne proviennent point d’une pensée humaine, d’un travail, d’une méditation, mais de la grâce de Dieu, et que ;.pour sa part il n’a fait que prêter sa langue, il ajoute : « Ma
- ↑ Plat. Ap. Socrat p. 22 ; et Men p. 99. D.