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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/65

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et marcher en avant et battre en retraite. Saint Paul agissait de la sorte : tantôt il cédait à ses adversaires, tantôt il leur résistait et marchait contre eux armé de la parole de vérité. Le Christ lui-même en usait ainsi pour notre instruction. Faisons de même nous aussi, sachons discerner avec exactitude l’opportunité des temps, craignons la tentation, et pour n’y pas entrer, faisons la prière qui se trouve dans l’Évangile ; mais, une fois la tentation venue, plus de faiblesse, mais une résistance généreuse. « Notre auxiliaire puissant dans les afflictions qui vous ont visités. » Ce que j’ai déjà dit bien souvent, je le répète encore : Dieu ne nous préserve pas toujours des assauts des tribulations, mais dès qu’elles nous assaillent, il nous assiste pour nous donner une fermeté dans le bien qui soit à toute épreuve. Quant au mot du texte qui signifie « puissamment », c’est à « Auxiliaire » qu’il faut le joindre. En effet, ce n’est pas un secours tel quel qu’il nous prête, c’est un secours surabondant, un secours qui nous procure plus de consolations que les afflictions ne nous apportent de peine. Il ne proportionne pas strictement son aide à la gravité de nos périls, il dépasse toujours cette mesure. « C’est pourquoi nous ne serons pas saisis de crainte », dit le Prophète, « quand la terre serait bouleversée. » Voyez-vous comment le secours accordé surpasse l’épreuve soufferte, avec quelle surabondance il arrive ? Le Psalmiste ne dit pas seulement : nous échapperons au danger, nous ne périrons pas, mais : nous n’éprouverons pas même ce qui semble le propre de la nature, je veux dire la terreur et la crainte. D’où vient cela ? – de la surabondance de secours qui nous arrive.
Par ces mots de « terre », de « montagnes », de « cœur des mers », le Psalmiste ne veut pas parler proprement des éléments, ce sont des expressions figurées pour dire des dangers insurmontables. Quand même, dit-il, nous aurions devant nos yeux une confusion, un bouleversement universels, immenses, des événements tels que le monde n’en vit jamais, une collision formidable éclatant au sein de la créature divisée, la nature troublée ; ses limites déplacées, les fondements du monde ébranlés, les éléments rentrant dans le chaos, en un mot la perturbation la plus effrayante qui se puisse imaginer, non seulement nous serions sauvés, mais nous ne craindrions pas même pour notre salut. Et pourquoi ? – parce que le Maître de toutes choses nous donne son recours, nous tend la main, nous assiste. Si la menace de semblables catastrophes ne saurait nous faire céder et faiblir, combien moins le pourraient des ennemis s’avançant contre nous, même en bataille rangée. « Leurs eaux ont fait un grand bruit et ont été agitées. Les montagnes ont été ébranlées dans sa force (4). » Selon un autre interprète : « Le bruit et le tumulte des eaux et l’ébranlement des montagnes se font dans la glorification de Dieu. » Après avoir dit qu’ils ne craindraient pas même au milieu d’une collision de tous les éléments, le Psalmiste parlé de la puissance de Dieu, et dit que rien ne résiste à sa force. C’est comme s’il disait : nous avons raison de ne rien craindre, car ce qu’il fait maintenant ne diffère pas de ce qu’il fait toujours, c’est-à-dire qu’il publie sa puissance par les phénomènes de la création comme par les événements de l’histoire. Ce que dit le Psalmiste revient à ceci : il secoue, il agite, il transforme tout, comme il lui plaît ; tellement tout lui est aisé et facile. Et il me semble qu’il a en vue, quand il parle ainsi, des multitudes de vaillants hommes, des ennemis de haute puissance, des adversaires disposant d’un peuple innombrable. Telle est la puissance de Dieu, veut dire le Psalmiste, qu’il n’a simplement qu’à vouloir pour que toutes ces choses existent. Comment donc pourrions-nous craindre, ayant un tel maître ? « Changement de rythme[1]. » Un autre interprète met : « Toujours. – Le cours impétueux (5) » ; suivant un autre : « les divisions du fleuve » ; suivant l’hébreu : «  phalagau, a réjouissent la cité de Dieu ; le Très-Haut a sanctifié son tabernacle. » Suivant un autre : « sanctuaire de l’habitation du Très-Haut. – Dieu est au milieu d’elle ; elle ne sera point ébranlée ; Dieu la protégera dès l’aube du jour » ; suivant un autre : « dès l’aurore ; » suivant un autre : d au premier signe du matin. » Après avoir parlé de la puissance de Dieu, dé sa force irrésistible, de la facilité avec laquelle il fait toutes choses, l’auteur passe à la protection dont sa providence couvre les Juifs, et en peu de mots il nous met sous les yeux les biens qu’il leur a départis. Comme s’il

  1. Les Septante, Théodotion et Symmaque traduisent par diapslama (qua vote designari volunt canendi vices aut flexus, dit Bossuet, dissert de Ps), et Aquila par Άεί, le mot hébreu Sela que l’on trouve souvent au milieu et quelquefois à la fin des psaumes.